Chroniques
Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture.
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GENTLEMIND
- Par asbl-creabulles
- Le 21/05/2021
Tome 1 : Gentlemind - Épisode 1
Scénario : Teresa VALERO & Juan DIAZ CANALES
Dessin : Antonio LAPONE
Couleurs : Antonio LAPONE
Dépot légal : août 2020
Editeur :
ISBN : 978-2-205-07637-0
Planches : 68New York 1939. Jeune femme de vingt ans, sans qualification particulière ni fortune, Navit est éprise d’Arch, un jeune dessinateur sans le sou. Celui-ci tente de se faire engager à la rédaction d’une revue sans succès, Gentlemind, qui prête son titre à cette bande dessinée. Contre son gré, Arch va pousser Navit dans les bras du directeur de la revue, H.W. Powell, un vieux milliardaire plus préoccupé par les mannequins de Gentlemind que par le succès financier de la revue. À force d’insistance, Navit finira par accepter d’épouser Powell. Ce personnage n’est pas sans rappeler le milliardaire et magnat de la presse du film "Citizen Kane" d’Orson Welles, lui-même fortement inspiré du réel milliardaire William Hearst. Au décès de Powell, Navit se retrouve à la tête de la revue, qu’elle tentera tant bien que mal de redresser, avec force d’audace et d’idées innovantes. Son chemin croisera celui de Waldo Trigo, un requin du barreau new-yorkais, tombé en pleine crise d’humanisme et de boulimie littéraire.
Mon avis : C’est parti pour un voyage dans le New York des années 1940. Les scénaristes, Juan Diaz Canales et Teresa Valero ont aussi scénarisé respectivement Blacksad et Sorcelleries (un point commun est vite trouvé: Juanjo Guardino dessine ces deux séries). Ils nous emmènent dans une ville grouillante de vie. Avec sa faune variée, du jeune artiste à l’enthousiasme inversement proportionnel à son succès, au milliardaire à la fougue inversement proportionnelle à sa jeunesse. Mais, surtout, avec l’émergence d’une jeune femme au cœur d’une industrie encore dominée par le "sexe fort". La manière par laquelle Navit tentera de trouver, pour renouveler son magazine, ce qui intéresse les hommes est pour le moins ingénieuse et pleine de légèreté malicieuse.
Le dessin d’Antonio Lapone est unique. Il est empreint de douceur, de couleurs pastel et surtout d’élégance. L’élégance irradie le lecteur dès la couverture. Le dessinateur du tout aussi élégant "La fleur dans l’atelier de Mondrian" (Glénat, 2017) – l’artiste néerlandais exilé à New York à la même époque aurait d’ailleurs pu croiser Navit – ponctue notre lecture par des affiches ou des unes de revues réinventées, devant lesquelles on reste admiratif. Les couleurs douces nous plongent dans les années 1940.
N’hésitez pas : mettez votre 33 tours préféré de Duke Ellington ou de Billie Holiday dans votre gramophone, installez-vous dans votre divan avec un bon verre, prenez en main votre Gentlemind et embarquez pour le voyage. Cerise sur le gâteau, la suite et fin est annoncée pour cette année 2021.
Il faut lire Gentlemind si vous aimez : les années 40 à New York, les femmes de poigne, le dessin de presse, l’élégance du trait d’Antonio Lapone
Jean-BaptisteL
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PEER GYNT 1
- Par asbl-creabulles
- Le 21/05/2021
Tome 1 : Acte I
Scénario : Antoine CARRION
Dessin : Antoine CARRION
Couleurs : <N&B>
Adapté de : Henrik IBSEN
Dépot légal : Février 2021
Editeur :
Collection : Métamorphose
ISBN : 978-2-302-09136-8
Nombre de pages : 100Peer Gynt aujourd’hui âgé nous raconte sa vie de jeune paysan très peu motivé pour cette tâche car plutôt porté vers le rêve et l’imagination. Paresseux, égoïste et surtout menteur invétéré, prétentieux, vaniteux, fabulateur, il partage sa vie avec sa mère Ase qui n'en peut plus d'écouter ses histoires et autres fabulations. Coutumier des escapades, sa vie sentimentale est tout aussi chaotique. Alors qu’il aurait pu se fiancer à Ingrid, une fille de riche propriétaire qui le regardait d’un œil tendre, il a choisi de partir vers de nouvelles aventures. Le regret va néanmoins le pousser à chercher à la reconquérir alors qu’elle est sur le point de se marier. C’est là qu’il croise Solveig qui semble tout acquise à son amour sauf que c’est Ingrid qu’il veut conquérir. Il n’hésite pas à la kidnapper et fuir avec elle, persuadé qu'elle finira par l'aimer pour sa personne. Mais de nouveau sa nature reprend le dessus et il l’abandonne car cette fois, il en est certain, c’est Solveig qu’il aime et c’est auprès d’elle qu’il réalisera son rêve d’être roi ou empereur. Fuyant tous ceux qu’il a offensés en commençant par le père d’Ingrid, il tombe, se cogne la tête et à son réveil se retrouve dans un monde de créatures fantastiques. Une femme se présentant comme la fille du roi de Dovre lui apparaît. Peer se prétend fils de roi. Ils s’éprennent aussitôt l’un de l’autre. En fait, il s’agit de trolls mais ayant conquis le cœur de la fille d’un roi, Peer se voit déjà prince d’un nouveau royaume. Aurait-il enfin trouvé sa place? Combien de temps cela-va-t-il durer?
Mon avis : Que voilà un album singulier. Il s’agit du premier tome de l’adaptation par Antoine Carrion de la pièce de théâtre éponyme écrite en 1867 par le dramaturge norvégien Henrik Ibsen qui s’est inspiré de contes et légendes populaires.
Ce premier tome en reprend les trois premiers actes, le second tome correspondra aux deux derniers.
Avec un soupçon de fantastique (trolls, sorcières, etc.), l’histoire est en fait une quête d’identité.
Accumulant les défauts, le personnage principal mène une vie ne respectant aucune règle. S’il a besoin des femmes et d’amour et de stabilité, son orgueil et son ambition vont lui jouer les pires tours tout au long de ses errances réelles ou imaginaires. On l’accompagne au point de ressentir une certaine empathie à son égard tellement il accumule les malheurs. Au fur et à mesure de ses rencontres, de ses mésaventures et de ses échecs, qu’il provoque lui-même la plupart du temps, on espère qu'il va se reprendre à un moment ou à un autre. Mais force est de constater qu’il n’a vraiment aucune caractéristique du héros traditionnel.Parallèlement à cet important travail d’adaptation scénaristique, Antoine Carrion nous propose une bande dessinée au graphisme original de toute beauté, à base de noir et blanc avec toutes les nuances de gris, mais aussi de jeux de lumière et d’ombre savamment dosés pour souligner le caractère particulier du récit à mi-chemin entre réalité et fantasmes. C’est notamment le cas dans les pages chez les trolls, en particulier lorsque surgit le "grand courbe" sur deux pleines pages dépliantes.
L’album présente une grande richesse de décors naturels, paysages brumeux, montagnes floues, ciel nuageux, atmosphère sombre, et de nombreux personnages aux physionomies expressives.SDJuan
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OLYMPIA KYKLOS
- Par asbl-creabulles
- Le 20/05/2021
Tome 1
Scénario : Mari YAMAZAKI
Dessin : Mari YAMAZAKI
Dépot légal : Mars 2021
Editeur : Casterman
Collection : Sakka
Format : Manga
ISBN : 978-2-203-20298-6
Planches : 185T1/ La nature a doté Démétrios d’un corps bâti pour l’activité physique. D’ailleurs, il aime courir, s’amuser avec les dauphins, sauter d’une falaise à l’autre. On peut dire qu’il affiche une forme olympique. Et pourtant, même s’il a tout pour être un grand athlète sans avoir à faire aucun effort ou presque et si son entourage le pousse à se présenter pour les prochains Jeux Olympiques au lieu de décorer des amphores, la compétition ne l’intéresse pas du tout. Démétrios préfère, et de loin, la peinture. Rien ne peut le rendre plus heureux que d’exercer son talent de décorateur de vases en pensant à Apollonia, la fille du chef du village. Et quand celui-ci, pour éviter un conflit avec le village voisin, propose de régler le contentieux en organisant une compétition sportive dont il sait qu’il sortira vainqueur grâce à Démétrios, ce dernier s’en désintéresse et continue de prétendre mener sa vie comme bon lui semble… Jusqu’à ce jour où, sous l’orage, les éclairs et le tonnerre, il se retrouve soudainement entraîné dans un voyage dans le temps qui va complètement chambouler sa vie.
Tome 2
Scénario : Mari YAMAZAKI
Dessin : Mari YAMAZAKI
Couleurs :<N&B>
Dépot légal : juin 2021
Editeur : Casterman
Collection : Sakka
Format : Format Manga
ISBN : 978-2-203-20300-6T2/ Démétrios a réussi à sauver son village après son voyage dans le temps, au XXe siècle. A présent, il n’aspire plus qu’à retrouver ses pinceaux mais le patriarche, chef du village, qui est convaincu qu’il est un grand athlète, continue d’intervenir dans sa vie. Ayant vu l’assiette décorée rapportée d’Olympie, il exige de Démétrios qu’il peigne à son tour des athlètes en action sur ses jarres et poteries au lieu d’images à caractère social de la vie courante qui ne se vendent pas. Démétrios fait un nouveau voyage dans le temps en 1964 au Japon à l’époque des JO d’été. Là, il va découvrir une nouvelle forme de dessin tout à fait différente de ce qu’il connaît, le manga. Et surtout, ce ne sera pas auprès de n'importe qui puisqu’il s’agit du grand artiste Ozamu Tezuka dont il va même devenir l’assistant !!
Mon avis: Après un début traité d’une manière plutôt classique, la surprise est totale lorsque la mangaka Mari Yamazaki bouleverse le récit en y introduisant des voyages temporels. L’effet de surprise passé, ces allers-retours dans le futur et/ou le passé, la Grèce antique et le Japon moderne, lui permettent de nous proposer une comparaison de deux modes de vie, de deux cultures, de deux conceptions du sport sur lesquels viennent se greffer non seulement divers enjeux politiques mais encore des enjeux amoureux. Une écriture surprenante mais solide qui lui permet de multiplier les rebondissements agrémentés d’une pointe d’humour. A lire en fin d’album un dossier complémentaire intitulé "La céramique, les Jeux olympiques et moi".
Au dessin, Mari Yamazaki nous a déjà démontré son savoir-faire et son talent de dessinatrice avec la série Thermæ Romæ. On la retrouve pleinement ici toujours aussi passionnée par l’Antiquité européenne. Son dessin est plein d’énergie, dans un style plutôt réaliste avec de très belles cases, de très belles pages au trait soigné et détaillé et riches en décors des deux civilisations évoquées. Côté émotions, les codes du manga sont d’application, les personnages étant pour la plupart représentés avec beaucoup d’expression, notamment les athlètes des épreuves du pentathlon antique. Une lecture des plus agréables et plaisantes.SDJuan
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WANTED LUCKY LUKE
- Par asbl-creabulles
- Le 19/05/2021
Wanted Lucky Luke
Scénario : Matthieu BONHOMME
Dessin : Matthieu BONHOMME
Couleurs : Matthieu BONHOMME
Dépot légal : avril 2021
Editeur : Lucky Comics
ISBN : 978-2-88471-477-8
Nombre de pages : 68Lucky Luke vient tout juste d’échapper à un tireur posté sur les rochers dominant la vallée. L’échange de coups de feu a été violent et rapide. Certain de l’avoir blessé, Lucky Luke doit malgré tout faire vite s’il veut mettre la main dessus. Arrivé sur place, seule une mauvaise surprise l'attend: l’affiche tâchée de sang de sa tête mise à prix pour 50.000 $. C’est alors qu’il entend une nouvelle fusillade. Il se dirige rapidement vers le lieu de l’attaque et aperçoit des indiens en train d’encercler une caravane. Ni une ni deux, il se précipite et règle la question en quelques tirs bien ajustés, découvrant ... trois jeunes et belles femmes, en fait trois sœurs, qu'il va s'empresser de sauver. Elles se rendaient à Liberty pour y vendre leur bétail, bien décidées à prendre un nouveau départ dans la vie suite à la mort de leurs parents. Habitué à s’occuper des troupeaux, Lucky Luke se propose de les accompagner car leur route traverse le territoire des Apaches et de leur chef redouté Patronimo. Le voyage s’annonce périlleux et les surprises nombreuses d’autant que lui-même est désormais recherché…
Mon avis : En parallèle de la série principale, Matthieu Bonhomme poursuit sur sa lancée en nous proposant une nouvelle aventure, certes à part, mais qui conserve tous les codes du genre : des paysages secs, des chevaux, un avis de recherche avec mise à prix, des bandits de grand chemin, des indiens, les tuniques bleues, des colts, des arcs, des embuscades… autant d’ingrédients pour un album plein d'action et de rebondissements.
Le titre, à lui seul, en est déjà la promesse, "Wanted Lucky Luke" où le mot Wanted évoque bien sûr l’avis de recherche, la vengeance, la prime. De fait, le lonesome cow-boy n’est plus le chasseur mais bien une proie pour une bande de bandits, un fils réclamant vengeance, des indiens, l'armée et maintenant trois demoiselles (voir la dernière case de la page 58). Et, d’ailleurs, ces trois sœurs secourues pourraient bien être intéressées de toucher la prime d’autant que le "criminel" recherché les accompagne volontairement et qu’il n’est pas pour leur déplaire… Oh les gourmandes... lol ! De toute manière, elles sont gagnantes !
Après avoir réussi le pari de réaliser un premier tome plus sombre qui a connu un beau succès, Matthieu Bonhomme récidive avec toujours autant de talent mais dans un style plus fun agrémenté d’une bonne dose de romantisme grâce à la présence de ces trois jolies sœurs, Angie, Bonnie et Cherri, qui vont avoir des vues sur le cowboy, chacune à sa manière. À nous de deviner laquelle compte réussir à le faire craquer... si tant est que l'une d'elle y parvienne, bien entendu.
Une aventure western rythmée, très fluide, avec son lot d'événements inattendus, tout à fait digne des albums de la grande époque du héros et en quelque sorte hommage à Morris et à l’univers de Lucky Luke, complétée d’une évocation de personnages réels comme Jeronimo ici sous les traits de Patronimo, avec de bons dialogues, de l’humour, de l’émotion et toujours des surprises là où on ne les attend pas toujours.
Un album tous publics mais à plusieurs niveaux de lecture, une bonne aventure western pour un public jeune là où un public adulte percevra les allusions cachées dans certains dialogues ou illustrations…En ce qui concerne le dessin, tout en conservant sa griffe personnelle, Matthieu Bonhomme nous fait penser aux années Morris, alors que les deux styles sont différents.
Même si j’ai une préférence pour la version N&B, il est indéniable qu'il a réussi à travailler les ambiances de manière efficace en jouant avec les couleurs (en nombre très limité) que Morris utilisait sur certaines scènes. Sauf que lui travaille la couleur par pages, en bi ou trichromie, inversant parfais les couleurs sur certaines cases par rapport aux précédentes.
Mais là où l'auteur fait très fort, c'est sur le trait net et précis, l’encrage très propre, des points de vue d’allure cinématographique, un découpage soigné, dynamique, efficace, une atmosphère générale typique western et des émotions particulièrement bien rendues … le tout sans dénaturer le personnage puisqu'il ne le fait pas succomber aux "assauts" des trois belles demoiselles afin qu’il puisse poursuivre ses aventures de "lonesome cow-boy" comme il le chantonne en début et en fin d'album.
Vous l’aurez compris, un album à ne pas rater et que l’on peut lire sans avoir dû lire toute la série mère.À noter que la version N&B CanalBD (si vous avez eu la chance de trouver l’un des 2000 exemplaires édités) est enrichie d’un supplément de 11 pages d’illustrations crayonnées et encrées autour d’un entretien avec l’auteur.
SDJuan
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BLACK SQUAW T2
- Par asbl-creabulles
- Le 17/05/2021
Tome 2 - Scarface
Scénario : YANN
Dessin : Alain HENRIET
Couleurs : USAGI
Dépot légal : Mai 2021
Editeur :
ISBN : 979-10-34754-11-3
Planches : 48Plus d’un soldat afro-américain de l'armée US venu combattre en Europe est rentré au pays bouleversé après avoir découvert qu’un noir y était respecté et même acclamé comme un blanc et pouvait vivre sa vie normalement. Parmi tous les soldats de couleur ayant participé aux deux guerres mondiales sur les champs de bataille européens, l’un s'est particulièrement fait remarquer : Eugène Bullard, qui sera surnommé "l'hirondelle noire de la mort" après avoir rejoint comme pilote l’escadrille Spad en 1917. Et lorsque la toute jeune Bessie recevra une photo dédicacée de son héros, elle sera aux anges, elle qui a toujours voulu être aviatrice. Aujourd'hui, cette passionnée d’aviation a concrétisé son rêve malgré qu'elle ait du sang indien et afro-américain et bien qu’elle soit installée au Texas où le Ku Klux Klan n'est jamais très loin. Grâce à sa bravoure et sa détermination, elle y est arrivée. Il faut dire qu’elle est douée. Assez douée pour s’être fait remarquer par les hommes d’Al Capone ! Elle a enfin son propre avion et si elle travaille un peu dans l’illégalité, cela ne la dérange pas outre mesure, du moment qu’elle peut voler.
Mon avis: Le trio Yann, Henriet, Usagi poursuivant sur la lancée du tome 1 continue de nous faire découvrir l'incroyable parcours de sa nouvelle héroïne Black Squaw, largement inspiré de la vie de Bessie Coleman.
L’histoire évolue et se complexifie à coups de retours en arrière créant une intrigue à plusieurs niveaux.
On peut dire que Black Squaw porte bien son nom. L’auteur évoque divers événements de l’époque correspondant à des moments importants de la vie de l’héroïne en lien avec ses origines amérindiennes et son appartenance au groupe afro-américain, principalement le KKK mais aussi la mafia américaine, avec le célèbre balafré "Scarface" Al Capone, et ses trafics illégaux et plus encore (à découvrir pour ne pas trop spoiler).
Mais si plusieurs événements, faits et personnages ont réellement existé, cette grande aventure est une pure fiction.
Les rebondissements ne manquent pas tout au long d’un récit qui se déroule selon un rythme entraînant bien maîtrisé.Côté dessin, les amateurs d’avions anciens vont se régaler avec ce nouvel album qui confirme s’il en était besoin le talent d’Alain Henriet déjà largement apprécié sur Dent d’Ours et ses précédentes séries.
Il nous régale d’un dessin clair, aéré, soigné. On le sent très à l'aise pour les voltiges, loopings et autres acrobaties aériennes réalisés avec succès par Bessie pour déjouer (ou abattre) l'ennemi.
Beaucoup d’avions de toute beauté dans des paysages grandioses mais pas que. Henriet nous régale de belles scènes d'action, de superbes chevaux et de très beaux décors mais n’oublions pas surtout la ravissante Bessie.
Les cases sont bien travaillées (gros travail de documentation à l’appui) et agrémentées de plusieurs hommages à d'autres personnages BD.
Très agréable mise en couleurs d’Usagi, claire et dynamique donnant encore plus de vie à l'ensemble.A noter que l'album existe aussi en Édition spéciale avec jaquette de couverture et frontispice numéroté et signé par les auteurs au tirage limité de 999 exemplaires.
SDJuan
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KURUSAN, le samouraï noir T1
- Par asbl-creabulles
- Le 14/05/2021
Tome 1 - Yasuke
Scénario : Thierry GLORIS
Dessin : Emiliano ZARCONE
Couleurs : Bruno TATTI
Dépot légal : janvier 2021
Editeur :
Collection : Histoire & histoires
ISBN : 978-2-413-01990-9
Nombre de pages : 56Japon, 1570. Fils d'un seigneur local, Oda Nobunaga a réussi à se hisser au rang de "daimyo" (gouverneur militaire/seigneur de guerre). Désormais sa réputation le précède et lui a valu le surnom de Roi Démon. C’est un homme ambitieux qui convoite le titre de "shogun" (en quelque sorte, général en chef). Parallèlement, un jésuite italien nommé Alessandro Valignano est arrivé au Japon pour y effectuer la tournée des congrégations de son ordre, accompagné de son serviteur, Yusuf, un ancien esclave noir doté d’une force incroyable, qu’il a rebaptisé Joseph. Ce géant noir (il mesure presque 2 mètres), véritable force de la nature, est une curiosité au Japon et il attise des convoitises. Amené à croiser sa route, Oda Nobunaga est fort impressionné et manifeste clairement le désir de le prendre à son service. Il l’achète au missionnaire et le surnomme Kuru, c’est-à-dire "noir". Le peuple le surnommera désormais Kurusan ("monsieur noir"). Kuru doit alors suivre un enseignement strict pour apprendre la langue et les coutumes et traditions du pays. Il prend alors le nom de Yasuke. Il apprend vite et passe de simple curiosité à garde du corps de son maître. Ce dernier se liera d’amitié avec lui et le prendra même sous son aile pour en faire un homme de confiance. Pour le moment, il n’a pas encore qualité pour combattre mais très vite et avec l’aide de la chance, il se verra proposer une formation de guerrier, autrement dit de samuraï.
Mon avis : Le premier tome de "Kurusan, le Samouraï noir" accroche d’emblée le regard avec sa superbe couverture emblématique du sujet abordé, qui devrait ravir les amoureux de la culture japonaise traditionnelle mais pas seulement.
Thierry Gloris entreprend donc de nous conter un pan de l’histoire avec un grand H d’Oda Nobunaga, cet important daimyo (seigneur de guerre) de la période Sengoku (1477-1573), dite des provinces en guerre, de l’histoire du Japon.
Oda Nobunaga a passé sa vie sur les champs de bataille et a conquis une grande partie du Japon avant sa mort en 1582. On le voit nouer des liens avec cet esclave noir, dont le personnage mais surtout la stature l’ont littéralement fasciné, l’un des rares étrangers et sans doute le seul noir de tous les temps à être devenu samuraï.
On découvre l’ascension de Yusuf, alias Joseph, alias Kuru, alias Yasuke grâce à sa capacité de s’adapter et d’apprendre les coutumes japonaises.
On passe assez vite d’une étape à l’autre, sur ses rapports avec les différentes personnes qui l'entourent, sur les étapes de l’ascension de ce jeune apprenti samuraï. Vivement le tome deux pour le voir en action.
J’aurais aimé que cette phase d’apprentissage soit plus développée mais je suppose que ce n’est pas l’essentiel pour Thierry Gloris qui dirige plutôt son écriture vers les liens entre ces deux hommes de culture et de coutumes différentes, vers l'évolution de leur relation qui force le respect mais surtout sur le contexte et l’époque où se situe l’action, particulièrement riches en événements largement évoqués par les scènes de combat, complots et intrigues qui agrémentent le récit.
Un scénario bien construit et documenté et surtout intelligible à tous et pas seulement aux seuls initiés.Côté dessin, la qualité est au rendez-vous. Emiliano Zarcone passe avec aisance de scènes paisibles ou d’euphorie à d’autres plus violentes et même à des combats très durs au sabre.
Toute la panoplie de l'univers japonais est bien représentée, l’atmosphère générale, les édifices, les costumes, les tenues de combat traditionnelles.
Un ensemble dynamique, bien découpé où les couleurs (dues à Bruno Tatti) s’accordent aux différentes situations, notamment plus vives sur les scènes d’action.
Il n'y a pas que Kurusan qui se forme à la culture japonaise, le lecteur aussi.SDJuan
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LE PRÉ DERRIÈRE L'ÉGLISE
- Par asbl-creabulles
- Le 12/05/2021
Tome 1 . Le Pink Clover
Scénario : CRISSE
Dessin : Christian PATY
Couleurs : Christian PATY
Dépot légal : Mars 2021
Editeur :
ISBN : 978-2-302-08940-2
Nombre de pages : 48Kilkenny, quelque part dans les landes irlandaises. Comme chaque matin, le vieux curé prépare et répète son prêche derrière l’église du village. Il est plutôt désabusé car collé à son église il y a ce pub, le Pink Glover, qu’une bonne partie des villageois préfèrent à l’église et qui est devenu leur grand sujet de discussion et de désaccord. En fait, le curé n’est pas seul car, chaque jour, il a un auditoire fidèle de moutons qui l’écoutent parler et attendent les friandises qu’il a pris l’habitude de leur donner. Et même s’ils ne comprennent rien, ils l’écoutent car pour eux c’est la langue des anges. C’est Dieu en personne qui vient leur parler. Les moutons ne sont pas seuls. Partageant leur territoire, il y a aussi un hibou, un écureuil, un chien de berger, des chèvres et un bouc. Tous les jours la même scène se répète jusqu’à ce jour où le curé ne vient pas. Les moutons attendent, car Dieu peut bien arriver en retard, ce n’est pas eux qui vont le blâmer ou même le réprimander, c’est Dieu après tout. Toutefois, ils s’interrogent. Pourquoi ne revient-il plus ? Qu’ont-ils fait pour mériter ça ? Même s’il a vu que quelque chose d’inhabituel se passait, le hibou ne veut pas en informer les moutons. Dans le village, la rumeur se répand que le prêtre est décédé. Il aurait même été tué ! Dès lors, tout va se dérégler aussi bien chez les animaux que chez les humains.
Mon avis : Crisse, de son vrai nom Didier Crispeels, ne nous a pas vraiment habitué à ce genre d'histoires. C'est sur le plancher des vaches – ou plutôt des moutons – qu’il nous entraîne pour nous faire partager une aventure à la fois loufoque et grave, mélange de polar à travers l’enquête sur la disparition d'un prêtre et de questionnement existentiel sur la place de la religion tant de la part des villageois que des moutons pour qui le curé est Dieu venu sur Terre.
À de nombreux égards, les humains, ces "balourds de paroissiens" comme le dit si bien le curé, ne valent pas mieux que les animaux.
C'est drôle, bien mené et intelligent avec des dialogues soignés et piquants où chaque mot est pesé. Comédie, critique moqueuse des défauts des uns et des autres, orgueil démesuré, calomnie, stupidité des opinions, etc., on accroche tout de suite. L’histoire captive et on ressent même de l'empathie pour les bêtes tandis qu’on s’efforce de comprendre ce qu'il se passe dans la tête des gens.Les dessins de Christian Paty restituent parfaitement les ambiances, drôles comme inquiétantes, dans des paysages et décors irlandais attrayants.
Soulignées par un trait accentué, les bouilles incroyables d'impassibilité ou de béatitude des bêtes et les trognes très expressives et caractéristiques des humains donnent le ton.
Une belle mise en page et de bons choix de cadrages.
Des couleurs agréables donnant vie à l’ensemble.SDJuan
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ASPIC t8
- Par asbl-creabulles
- Le 10/05/2021
Tome 8 . Trois petits tours et puis s'en vont
Scénario : Thierry GLORIS
Dessin : Emmanuel DESPUJOL
Couleurs :Saint-Blancat, Cyril SAINT-BLANCAT
Dépot légal : mars 2021
Editeur :
Collection : Boussole
Cycle : 4
ISBN : 978-2-302-08939-6
Nombre de pages : 48L’enquête de l’Agence Aspic sur les ancêtres de Flora a mis au jour des aspects obscurs et condamnables sur les origines de la fortune familiale. Mais dans le même temps, ces vérités révélées et la sincérité et l’affliction de Flora ont permis de lever la malédiction qui accablait la famille. Satisfaits de cette vérité, les Gardiens des Maudits, ces fantômes qui hantaient la maison, ont finalement décidé de quitter les lieux. Il reste toutefois à élucider le mystère de la mort de la mère de Flora, revenue d'entre les défunts sous la forme d’une momie très bavarde. Elle en est certaine, elle a été assassinée par un membre de sa propre famille qui lui a offert un cadeau empoisonné. Il ne reste plus à Flora qu’à découvrir le coupable et pourquoi il y a eu meurtre.
Mon avis: Ce dernier tome intitulé "Trois petits tours et puis s’en vont" met fin aux enquêtes menées dans l’univers du surnaturel.
Les personnages atypiques et souvent drôles nous auront donc tenu en haleine jusqu’au bout depuis plus de dix ans.
L’album constitue une enquête de poids puisqu’il s’agit de trouver l’assassin de la mère de Flora, occasion de nous (re)faire découvrir l’histoire de la famille en apportant son lot de surprises avant de s’achever sur une conclusion plutôt surprenante.
On retrouve au passage tous les personnages pour la plupart sympathiques même si extravagants, parmi lesquels certains aïeuls plutôt singuliers qui ont rendu cette série passionnante, une série comme l’indique son titre complet "Aspic, détectives de l’étrange" mêlant intrigues, histoires de familles décapantes, enquêtes rondement menées sur fond d’occultisme, de fantastique mais aussi de comédie.Au dessin, Emmanuel Despujol (qui a succédé à Jacques Lamontagne à partir du tome 4) nous fait vivre l’aventure avec une énergie débordante.
Un dessin toujours aussi soigné et détaillé sur les décors et les personnages, jusque dans les plus petites cases, un beau travail sur les cadrages, les perspectives, la mise en page, tous variés et efficaces pour une belle fluidité narrative.
Beau travail également sur les couleurs de la part de Cyril Saint-Blancat. Belle mise en valeur du dessin de Despujol à qui l’on doit une illustration de couverture très parlante et attrayante.SDJuan