Créabulles, Expositions, Dédicaces, Rencontres.

Chroniques

Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture. 

  • ATALANTE La Légende T0

    Atalante 0 premiere larmeTome 0 . Première larme
    Scénario : CRISSE
    Dessin :Frédéric BESSON
    Couleurs : Frédéric BESSON
    Storyboard : CRISSE
    Couverture : CRISSE
    Dépot légal : Décembre 2020 mais sorti le 22 janvier 21
    Editeur :
    Soleil
    ISBN :978-2-302-09096-5
    Nombre de pages : 46

    Atalante et son compagnon de route, le satyre Pyros, cheminent vers Iolcos rejoindre Jason et les Argonautes pour de nouvelles aventures. Apercevant un hippocampe sacré piégé par un filet de pêche, Atalante tente de le délivrer quand les pêcheurs surgissent et l’assomment. Et c’est là que l’impensable arrive puisque ce même événement va se reproduire plusieurs fois sur une période très courte, de quelques instants seulement. Finissant par s’en rendre compte, Atalante a la certitude que le dieu Chronos est de près ou de loin mêlé à ce phénomène temporel qui perturbe ses projets. Et le pire c’est qu’à chaque répétition, une autre Atalante se retrouve dans le même espace-temps. Atalante 0 premiere larme plancheMon avis : Portant le numéro 0 de la série Atalante-La Légende, cet album tenant lieu de prologue (dont la publication coïncide avec le vingtième anniversaire de la série apparue en avril 2000) devrait plaire aux fans de l’héroïne… jusqu’à l’overdose compte tenu du nombre d’Atalante apparaissant au fil des pages. Mais rien n’est moins sûr vu sa plastique avantageuse. Bien loin de se torturer les méninges avec des boucles de temps et autres paradoxes temporels, Crisse opte pour un récit qui se veut avant tout agréable et divertissant. L’aventure est bien là et se poursuit autour de ce phénomène extravagant grâce à un scénario original qui nous réserve bien des surprises et rebondissements. On se laisse guider par la belle Atalante jusqu'au dénouement sans pinailler car le but n’est-il pas au final de passer un bon moment. Côté dessin, Fred Besson est sur la droite ligne de l'univers d'Atalante et on peut dire qu'il maîtrise bien son sujet. Même s'il n'égale pas – on ne le lui demande pas non plus – son mentor Crisse, il respecte tous ses codes, ses courbures, son bestiaire et ses mythes. Un dessin agréable, clair et dynamique, avec des couleurs à la hauteur des précédents albums.

    SDJuan

  • LES DRAGONS DE LA FRONTIÈRE

    Dragons de la frontiereCoup de coeurTome 1 . La piste de Santa Fe
    Scénario : Gregorio HARRIET
    Dessin : Iván GIL
    Couleurs : Garluk AGUIRRE
    Dépot légal : Février 2021
    Editeur : Editions glenat logo
    ISBN : 978-2-344-03330-2
    Nombre de pages : 56

    1778, Empire espagnol du Nouveau Monde. Une troupe de "Dragones de Cuera", ces cavaliers lanciers espagnols protégés par une longue cuirasse de cuir, ayant principalement pour mission de surveiller la frontière nord de l'empire appelé à l’époque la Nueva España, escortent un convoi de colons, hommes, femmes et leur bétail, entre Mexico et Sante Fe (actuel État du Nouveau-Mexique). Parmi eux, le cadet Miguel de Sasoeta, neveu du Lt-Colonel Anza qui commande le Fort de Santa Fe. Sur leur route, un guetteur aperçoit une troupe d’Apaches. Persuadés de s’en débarrasser facilement, les hommes de troupe déposent quelques bouteilles d'alcool car, selon la rumeur, les Indiens en sont friands jusqu’à s’écrouler ivres morts. Le convoi arrive enfin à la Mission de Nuestra Señora del Perpetuo Socorro pour faire étape. C’est là que l’attend un détachement d’infanterie d’une compagnie franche de volontaires catalans. Tandis que les hommes arrosent leurs retrouvailles, les sœurs prennent en charge l’une des femmes du convoi sur le point d’accoucher. C’est à ce moment que les Apaches qui n’ont pas touché à l’alcool supposé les arrêter attaquent la mission et kidnappent une jeune nonne, Sœur Madeleine dont Miguel était secrètement tombé amoureux. N'écoutant pas les conseils du Sergent Juan de Jesús Beitia El Chato des Dragons de Cuera qui préfére attendre l’aube pour partir à leur poursuite, Miguel se lance aussitôt sur les traces des Apaches, inconscient du piège qui est en train de se refermer sur lui, même si le Sergent Beitia et deux de ses hommes vont partir pour essayer de le rattraper et le ramener sain et sauf. Dragons de la frontiere page 1Mon avis: Voici une BD d’autant plus intéressante qu’elle aborde un sujet peu traité. En effet, généralement le genre western met en scène des cowboys, des indiens et des soldats yankees de l’Union vêtus de tuniques bleues protégeant les colons contre les tribus amérindiennes durant la conquête de l’Ouest ou les guerres indiennes. Peu de récits abordent le Far West du temps où il était espagnol et encore moins les "dragones de cuera".
    Sur un scénario bien construit, l’espagnol Gregorio Harriet nous entraîne à la découverte de la Nouvelle-Espagne du 18e siècle. On découvre les différentes tribus amérindiennes qui peuplaient la région et leur hiérarchie, les tribus Apaches parmi lesquelles les Mescaleros, évoqués dans l’album tout comme les Comanches, menés par Cuerno Verde (Green Horn, de son vrai nom Tabivo Naritgant signifiant homme dangereux), mais aussi les Navajos, les Wichitas et les Pawnees entre autres.
    Les relations avec les "Indiens" étaient régies par le "Traité", avancée significative vers la doctrine fondatrice du droit international moderne en ce qu’il a servi à instaurer des relations de paix et d’amitié avec les indigènes, sa forme concrète ayant été l’instauration d’une "paix du marché" permettant aux "Indiens" de commercer en paix avec les Hispaniques sur le territoire de la Vice-Royauté de Nouvelle-Espagne (plus ou moins les territoires actuels du Mexique, de l’Amérique centrale, des États de Californie, Arizona, Nouveau-Mexique et Texas, plus les Philippines en Asie du sud-est).
    N’oublions pas non plus le rôle important des missions religieuses catholiques qui ont servi à la conversion des Indiens et à leur assimilation dans la culture espagnole mais aussi, une fois sous le contrôle des autorités religieuses, à leur protection contre d'éventuels abus de la part de colons civils et militaires.Dragons de la frontiere pageDragon de cuera peint par Ferrer-Dalmau
    Quant aux Dragones de Cuera, il s’agit d’une troupe de cavaliers chargés de protéger la frontière nord de la Nouvelle Espagne (environ 6000 km de San Francisco en Californie à San Agustin en Floride) mais aussi d'accompagner les convois. Ils étaient lourdement armés d’une lance, d’un bouclier, d’une épée à large lame contrairement aux autres soldats espagnols qui n'avaient qu'une simple épée, d’un poignard, d’un pistolet et d’un mousquet ou d’une carabine. Ils portaient un manteau long sans manche très résistant, constitué de plusieurs couches de cuir, assurant une protection contre les flèches indiennes. Au fil du temps, ce long manteau se réduira à une simple cuirasse sur le torse. Le chapeau plat, également réalisé en cuir, avait la même fonction de protection contre les flèches. Chaque dragon avait 6 chevaux, un poulain et un mulet, en raison des immenses territoires qu'il devait contrôler. Les dragons constituaient de petites garnisons, très mobiles, parcourant plusieurs centaines de kilomètres par mois, continuellement à cheval pour patrouiller sur les vastes étendues nord-américaines, entre les ranchs et les missions, protéger les peuples indiens alliés, déceler toute activité hostile et même cartographier.
    Vous l'aurez compris, la lecture de cet album m’a clairement donné envie d’en savoir davantage sur cette période de l'histoire des États-Unis et de l'Espagne évidemment.Dragons de la frontiere page autre
    En ce qui concerne le dessin, le regard est immédiatement accroché par la couverture. Impressionnante, avec une pointe de mystère, en tout cas très réussie.
    Le dessinateur espagnol Iván Gil nous régale d’illustrations à la hauteur de l’attente, bien détaillées et riches en paysages et décors de l’Ouest américain. On est littéralement plongé dans l’aventure.
    On ressent la puissance des Dragons mais aussi la dangerosité des indiens, secs et nerveux, prêts à bondir à tout moment, toujours rusés et déterminés. Beaucoup de soin apporté aux différents costumes et tenues militaires. Les chevaux font largement partie de l’aventure. Présents en grand nombre tout au long de l’album, ils sont bien dessinés tant dans les scènes d’action qu’au repos.Dragons de la frontiere page de nuitTrès belle mise en couleurs d’Aguirre Garluk au service du dessin que ce soit dans les scènes bien éclairées ou de nuit.

    Un album de qualité, sur un sujet original, bien servi par un trio d’auteurs espagnols confirmant que ce pays est bien un réservoir de talents.

    SDJuan

  • CURTISS HILL

    Curtiss hillCoup de coeurScénario : PAU
    Dessin : PAU
    Couleurs : PAU
    Dépot légal : février 2021
    Editeur : Paquet
    Collection : Calandre
    Format : Format comics
    ISBN : 978-2-88932-170-4
    Nombre de pages :76

    A Melon Ville, Curtis Hill et Rowlf Zeichner sont deux pilotes de course automobile tout à fait hors normes. Chaque compétition à laquelle ils participent met le public en effervescence. L’un comme l’autre ils se sont entourés d’une équipe technique au top, notamment des mécaniciens de génie qui ne cessent de faire évoluer leurs moteurs et leurs carrosseries pour aller toujours plus vite. Et c’est grâce à eux qu’ils sont toujours les deux seuls à se disputer la première place. Ce sont aussi deux personnalités que tout oppose. Si Curtis est l’image même de l’homme distingué, chic, bien de sa personne et apprécié pour sa droiture, Rowlf en est l’opposé et toujours prêt aux mauvais coups pour remporter la victoire. Mais tandis que Curtiss s’inquiète car Dino, son mécano, l’a quitté à la veille de la course des 500 miles d’Escapula, Maugène Berk, une journaliste réputée pour ses articles mais surtout ses photographies, veut absolument obtenir une interview du champion. Les masques risquent bien de tomber …Curtiss hill pageMon avis: On est d’emblée propulsé à pleine vitesse dans cette aventure mettant en scène des personnages anthropomorphiques plutôt fascinants et attachants. Le danger est bien présent et l’on prend conscience que la vie des pilotes ne tient qu’à un fil. Mais derrière cette première impression du sport et du divertissement, on se rend vite compte que la réalité est différente, les caractères sont bien affirmés, les motivations claires et multiples tant chez les pilotes que chez les mécanos et même chez la photo-journaliste.
    Pau nous régale d’un récit efficace sur un scénario intelligent mêlant plusieurs histoires en parallèle, le tout dans un contexte qui joue lui aussi un rôle important, la grande crise et la montée du fascisme. C’est très bien conduit et, en prime, l’auteur glisse çà et là des hommages à d'autres auteurs en citant leurs noms ou en insérant l’un ou l’autre de leurs personnages dans son histoire.Curtiss hill page 2Un album très réussi donc avec une partie graphique tout à fait superbe. Des personnages aux bouilles expressives dans une tonalité générale sépia nous donnant l'impression de tenir en main une BD ancienne faisant penser à Calvo (évidemment), une mise en page des plus dynamiques donnant l’impression d’un dessin animé de l'époque des premiers Disney, Tex Avery ou autres du même genre, des bolides impressionnants de réalisme soulignés par un effet de vitesse surtout dans les virages mais aussi lors des accrochages.Curtiss hill page cineUn bel album d’un auteur aux multiples talents né à Palma de Majorque en 1972, de son vrai nom Jiménez-Bravo, peu connu de ce côté de l’Europe et c’est dommage même si nous avons pu l’apprécier en français sur La Saga d’Atlas & Axis (quatre tomes parus chez Ankama entre 2011 et 2016), Ze jackytouch (chez Paquet en 2013-14), diverses histoires courtes et hommages à Spirou, au Marsupilami, aux Tuniques bleues, etc. mais qui n’a cessé de produire pour le marché espagnol depuis les années 90 (sa bibliographie en espagnol est impressionnante). 
    Merci à Paquet de nous l'offrir dans ce bel habillage. 

    SDJuan

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  • CATAMOUNT 4

    Catamount 4Tome 4 . la rédemption de Catamount
    Scénario : GAEL'S
    Dessin : Benjamin BLASCO-MARTINEZ
    Couleurs : Émilie BEAUD & Benjamin BLASCO-MARTINEZ
    Adapté de : Albert BONNEAU
    Dépot légal : Janvier 2021
    Edi
    teur : Petit à petit
    ISBN : 978-2-380-46081-0
    Nombre de pages : 64

    Le quatrième tome de Catamount commence sur les chapeaux de roues car notre héros est poursuivi par un marshal peu scrupuleux. L'histoire serait bien courte si le valeureux Catamount mourait aussi vite. Il s'en sort indemne, ce qui n'est pas le cas de son destrier... Mais que fait la SPA?!
    À pied comme un poor lonesome cowboy – avouez, vous avez fredonné la chanson – il trouve refuge chez la vieille madame Gilson. Elle vit dans les bois, seule, depuis le départ de son fils William. Ce dernier est parti avec les dernières économies de la famille, vendant les troupeaux et quelques parcelles...  L'argent est parti au poker, en alcool et dans les femmes de petite vertu. Il doit sûrement cuver son whisky dans le fond d'un caniveau. En réalité, c'est au gredin Buck Winter qu'est revenu l'argent...
    Ce bon vieux fils Gilson est en fait dans la cité de Delgado où le misérable Buck Winter vole les honnêtes gens. En effet, il "rachète" les ranchs des environs - vous vous doutez des manières utilisées par ce gentleman - et il a des vues sur les terres de la jolie Paquita Mendez.
    Vous voyez où je veux en venir ? Voilà le tableau : Gilson fait la connaissance de Paquita et Catamount débarque à Delgado... Ces trois-là mettent les pieds dans une sacrée aventure !
    À trois contre le vil et vilain Winter accompagné de gens qu'on ne voudrait pas croiser à quatre heures du matin dans une ruelle sombre, ils vont faire en sorte que le ranch reste dans les mains de mademoiselle Mendez.
    Mais dans un pays où la loi est faite à coups de Smith & Wesson, les balles se perdent et sifflent bien près de vos oreilles...Catamount 4 plancheMon avis : Une bande dessinée qui se laisse lire et nous emmène à l’aventure. Le schéma est assez classique et n’apporte pas autant de surprises que je le voudrais.
    La bande dessinée est bien découpée et on sent l’apport de Gaet’s dans la qualité du scénario.
    Le dessin de Benjamin Blasco-Martinez est comme le bon vin, il se bonifie avec le temps. C’est un jeune dessinateur à tenir à l’œil et j’espère qu’il prendra une autre dimension grâce à un personnage de son imagination ou la reprise d’un grand personnage du monde de la BD franco-belge. On le voit bien avec des reprises telles Barbe Rouge et Stefano Carloni, Simon Van Liemt et Ric Hochet ou très bientôt Paolo Grella et Bob Morane. C’est tout le mal que je lui souhaite!

    Jordan Maenhout

  • Le SPIROU DE Christian DURIEUX

    Spirou de christian durieux 1Pacific Palace
    Scénario :  Christian DURIEUX
    Dessin : Christian DURIEUX
    Couleurs : Christian DURIEUX
    Dépot légal : Janvier 2021
    Editeur :
    Dupuis 1
    Format : Grand format
    ISBN : 979-10-34732-69-2
    Planches : 78

    Licencié, Fantasio vient de perdre son job de journaliste au magazine Le Moustique. Pour lui venir en aide, Spirou a réussi à le faire engager comme groom au Pacific Palace après avoir fait son éloge auprès de Monsieur Paul, son supérieur. Mais ce dernier a tôt fait de constater que Fantasio n'a pas vraiment le profil requis pour le poste – il n’est guère souriant ni courtois et râle beaucoup – sauf qu’il a besoin de lui. En effet, l'hôtel vient d’être réquisitionné. Ses prestigieux clients ont été priés de quitter les lieux et son personnel réduit pour permettre d’accueillir dans la discrétion la plus totale le Président Iliex Korda, le dictateur déchu de la république démocratique du Karajan, ainsi que sa famille et ses gardes du corps. Iliex Korda est décrit comme un tyran. Il n’a pas hésité à éliminer tous ses opposants pour arriver au sommet de l'État, placer les membres de sa famille aux plus hauts postes et se faire nommer président à vie. Malgré tout et avec un personnel restreint, l'hôtel se doit d'offrir un service impeccable à la hauteur de sa réputation. Seccotine et son équipe télé ne pouvant franchir les grilles de l'hôtel pour faire leur reportage, Fantasio se voit comme LE reporter qui va pouvoir couvrir l'événement. Il espère ainsi se faire réembaucher au journal. Quant à Spirou, et c’est là le hic de l’histoire, dès qu’il a vu Elena, la fille du dictateur, il en est éperdument tombé amoureux.Spirou de christian durieux planche 1Mon avis: Une histoire politico judiciaire superbement scénarisée par Christian Durieux qui parvient sous un calme apparent à entretenir la tension durant tout l’album, une tension tour à tour de nature politique avec le président/tyran, mystérieuse avec ses gardes du corps surgissant de nulle part à tout moment ou amoureuse grâce à la belle et envoûtante Elena. L’intrigue est originale, savamment construite pour maintenir le suspense jusqu’à la fin dans le huis-clos de cet hôtel où, devenu observateur, on assiste à une succession d’événements auxquels l’auteur apporte une touche d’imaginaire. C’est singulier, différent de tout ce qu’on a lu ou vu jusqu’ici mais, à coup sûr, très efficace tout comme les illustrations. Spirou de christian durieux planche suite 1Un dessin très agréable, au trait fin et délicat, dans le superbe décor de cet hôtel de grand standing. De belles ambiances grâce aux couleurs pastel et une dizaine de pages de scènes bleutées et des cadrages soignés du plus bel effet. Les planches grand format que j’ai pu admirer lors de l’exposition Durieux chez Champaka avant de lire l'album soulignent bien la tension qui caractérise le récit. On note surtout un casting impressionnant de têtes des plus charismatiques et des personnages représentés avec des petits yeux à l’exception de la belle Elena, qui elle, les a grand ouverts et un regard ensorcelant.
    Un très bon moment de lecture avec cette nouvelle pièce de la collection "Le Spirou de…" qui nous donne l’occasion d’apprécier des talents très divers.

    SDJuan

  • BARTLEBY le Scribe

    Bartleby le scriptCoup de coeurUne histoire de Wall Street
    Scénario : José Luis MUNUERA
    Dessin : José Luis MUNUERA
    Couleurs : SEDYAS
    D'après : La nouvelle de Herman MELVILLE
    Traduction : Geneviève MAUBILLE

    Lettrage : Eric MONTESIMOS
    Préface : Philippe DELERM
    Postface : Alex ROMERO
    Dépot légal : février 2021

    Editeur : Dargaud logo
    ISBN
    : 978-2-505-08618-5
    Nombre de pages : 72

    Quartier de Wall Street. Envoyé par la Ville de New York, Bartleby se présente au cabinet d’un notaire ravi d'avoir un nouveau scribe depuis le temps qu'il demandait du renfort. Il faut dire qu’il croule sous le travail. Bartleby découvre son bureau installé juste devant une fenêtre qui donne directement sur... un mur. L'arrivée de ce jeune homme calme, appliqué et concentré sur son travail qu’il accomplit avec le plus grand soin, et d’une nature peu encline à la distraction convient parfaitement à son employeur. Il a même une très bonne influence sur ses deux collègues, Turkey et Nippers, qui jusque-là se plaignaient sans cesse de leurs conditions de travail et de leur maigre salaire ainsi que sur Ginger, surnommé Nut, le commis chargé des courses. Quelques jours plus tard, comme il en a l’habitude, le notaire rassemble tout le monde car le moment est venu de vérifier toutes les copies d’actes juridiques avec les originaux. À la surprise générale, Bartleby refuse de participer à ce contrôle en déclarant "je préférerais pas". Malgré l'insistance de son patron et de ses collègues, rien n'y fait. La même situation va ainsi se répéter de jour en jour. Il refuse poliment en prononçant les mêmes paroles : "Je préfèrerais ne pas le faire". Le notaire, décontenancé et ne parvenant pas à l’obliger, ne sait plus comment réagir. Et les choses ne vont pas aller en s'améliorant...Bartleby le script pageMon avis : Sachant qu’une énergie folle caractérise le trait de José Luis Munuera, entreprendre une telle BD a dû constituer un sacré défi pour lui.
    Alors qu’il vient de nous offrir (octobre 2020) le dernier Tuniques Bleues (tome 65, L’Envoyé spécial, avec les BéKa) que j'ai adoré, et bien d’autres titres auparavant (Sortilèges avec Jean Dufaux dont la première intégrale est rééditée en même temps que Bartleby, Les CampbellZorglub), il se risque à adapter non pas Moby Dick mais une autre nouvelle d'Herman Melville parue en 1856 sous le titre "Bartleby, the Scrivener". Et le défi est brillamment relevé. L’histoire se situe dans le quartier de Wall Street à New York, haut lieu de la finance et de la puissance américaines. On sent tout de suite que la ville est un personnage à part entière mais aussi cette foule condensée de patrons et d’employés obéissant à un système établi.
    Le notaire est déstabilisé car il se retrouve devant quelqu'un qui ne se plie pas aux exigences de la société : le devoir, l’obéissance.
    En refusant de travailler, que cherche Bartleby ?
    Faire acte de désobéissance et de contestation ?
    Ne saisit-il plus le sens de son existence ou cherche-t-il à s’en rendre maître tout en devant en payer le prix?
    Une lecture qui soulève bien des questionnements.Bartleby le scribe planche
    Auteur complet, José Luis Munuera nous fait vivre cette histoire grâce à des ambiances incroyables, des vues d'ensemble de la ville, du quartier, des rues mais aussi de l’intérieur des bureaux, le tout dans des variations de couleurs plutôt monochromes du plus bel effet. Son talent s’exprime aussi dans les bouilles, les visages très expressifs, joie, étonnement, désappointement sans oublier la mélancolie qui caractérise Bartleby.
    À noter aussi le travail remarquable de Sedyas, compagnon de route de Munuera sur ses autres albums, qui réussit à souligner les ambiances et donner une belle profondeur aux très nombreux décors ainsi qu’aux personnages de second plan qui sont davantage travaillés par la couleur que par le trait que Munuera réserve souvent de manière accentuée aux personnages de premier plan.

    Bartleby jacquette 1Bartleby jacquette 2Bartleby jacquette 3

    "Je préférerais ne pas" vous rappeler que depuis ses premières publications en Espagne à l’âge de 17 ans, José Luis Munuera n’a cessé de nous surprendre.
    "Je préférerais ne pas" vous dire qu'i
    l est sans aucun doute à présent un auteur majeur de la BD franco-belge. 

    SDJuan

  • CROMWELL

    CROMWELL Anita Bomba et ArtbooksCromwell

    Anita Bomba,
    Autre univers, des jolies guerrières, des robots, des trognes, des décors de SF déglinguée, une faune et une flore mutagènes, un scénario qui déroute, qui décoiffe.
    Rhââ Lovely comme dirait Gotlib. 
    Je m’accrochais au bord des falaises de ce monde qui m’intriguait et hésitais depuis quelques années déjà à plonger dans cet océan d’encres et de couleurs. Mais Anita et La Rafale telles des sirènes m’envoûtaient et je me suis laissé entraîner par cet Ailleurs créé par un génie inclassable du dessin, j’ai nommé POPEYE CROMWELL, le démiurge créateur d’un monde unique. 
    Je commencerai par les Comics :

    Anita Bomba 1, 2, 3 

    Cromwell 1 Cromwell 2 Cromwell 3

    Couverture sur beau papier glacé bien épais et au verso une peinture très sexy destroy où tout l’art de Cromwell s’exprime dans la matière, les chiens, les robots et les femmes. 
    Celle du nº 1 est bluffante. Je kiffe. 
    L’intérieur présente chaque fois un épisode d’Anita, des strips de Mimosa dessiné par Edith avec des scénarios de Catmalou. Mimosa est une petite fille qui n’a pas sa langue en poche. Ses réparties sont d’une finesse percutante. 
    Il y aussi un texte de La Houle illustré par Julien Loïs de même qu’une BD très déjantée de Josepe. 
    Il faut encore ajouter deux illustrateurs pour les numéros 2 et 3 : Rimka et Toulhoat. 
    J’espère n’avoir oublié personne. 
    Je reviens à Anita qui anime de sa présence si remarquable chaque Comics. Cromwell, Catmalou et Éric Gratien ont concocté un scénario à la folie douce mettant en place des décors et des personnages représentés de différentes manières par cet artiste aux multiples facettes qu’est Cromwell.
    Anita plaque ses deux comparses après avoir fait sauter un coffre. 
    Pour eux, la pilule amère sera très difficile à avaler. 
    Attention pas de casse à la Tom Cruise ici.
    Les cartésiens, passez votre chemin.
    Les curieux qui veulent être secoués et sortir des sentiers battus tout en tricotant des méninges... vous êtes les bienvenus. 
    Décrire cette manière de créer, de partir d’un univers mental et de le transmuter sur la page risquerait de réduire l’impact que vont produire tous ces dessins sur votre rétine servant de réceptacle avant que le nerf optique n’envoie toutes les infos générées par ces pages venant d’ailleurs à votre cortex visuel qui va se régaler devant cette création si intelligente.
    Il y a Philippe DRUILLET et il y a Popeye CROMWELL, ni plus ni moins. 
    Deux dessinateurs mettant en œuvre leur univers propre et impressionnant. 

    En témoignent évidemment les deux Artbooks qui sont parus en automne 2020. 

    Cromwell 5 Cromwell 4

    1. Quelque Part qui est la réédition de celui paru en 2011. 
    Ce livre à la maquette très moderne présente 5 chapitres ouverts chacun par une illustration panoramique de toute beauté. 
    Chapitre 1 : Sur la piste des hors-la-loi. 
    Chapitre 2 : Au fond d’un vieux carton.
    Chapitre 3 : Sur les bords de l’Hudson river. 
    Chapitre 4 : Entre futur et no future. 
    Chapitre 5 : À des milliards d’années d’ici. 
    Tous ces chapitres présentent les différents travaux réalisés par Cromwell, les supports sont variés, les procédés encore plus. 
    Tels ces indiens aux traits anguleux qui jaillissent de toutes ces couches de peinture étalées, plaquées avec un rendu du plus bel effet.
    Ou ces illustrations au bic rouge et noir, des gouaches, des pastels... 
    Il faudra feuilleter, regarder, contempler, analyser toutes ces pages de nombreuses et de nombreuses fois pour en recueillir toute la quintessence (mot piqué au dos de la couverture).
    Tous les textes explicatifs français/anglais sont de Cromwell

    Cromwell art book2. End Zone 
    Deuxième Artbook. Tout beau, tout neuf. Même maquette, même conception.
    1. Au fond d’un vieux carton
    2. Sketchbook 
    3. Lab
    4. Sketchbook
    5. Lab.
    Ici, Cromwell nous fait découvrir ses premières fois. 
    Très instructif de découvrir les influences qui ont amené l’évolution de son trait depuis la fin des années​​​​​​​ 60, en passant par les 70’ pour arriver en 1984 où se devine un embryon du trait récent mais c’est entre 1987 et 1992 avec Les Minettos Desperados que PAF! Son style éclate et recouvre les pages blanches de hachures nerveuses, sanglantes et virevoltant dans tout l’espace Cromwell extrait du artbook end zone​​​​​​​
    Place aux créatures, aux trognes, aux chiens, à Anita, aux extra-terrestres...
    Des crayonnés, de l’encre, La Rafale troublement inquiétante.
    Anita encore, plus envoûtante que jamais. 
    Des bagnoles sanguines. 
    Et pour terminer, les Indiens du Grand Nord et une femme aux cheveux rouges si ensorcelante. 
    Ces dernières pages atteignent le sublime. On touche le Graal. Cromwell artbook 2Merci Cromwell !!!

    M.Destrée

  • LOVE, LOVE, LOVE

    Coup de coeurTLove love loveome 1 . Yeah Yeah Yeah
    Scénario : Kid TOUSSAINT
    Dessin : Andrés GARRIDO
    Couleurs : Andrés GARRIDO
    Dépot légal : Février 2021
    Editeur :
    Dupuis 1
    ISBN : 979-10-34733-56-9
    Nombre de pages : 56

    Elle van Eden vient de perdre son job de serveuse. En fait, la jeune femme passe une sale période car elle a dû partir de son appart et son ami l'a plaquée. Et maintenant, elle est virée de son travail. Et comme si cela ne suffisait pas, voilà que le trafic sur sa ligne de métro est interrompu. C’en est trop. Dans un mouvement de rage et de maladresse, elle jette son gobelet de café... Évidemment, le gobelet au lieu de tomber au sol atterrit sur le pantalon d'un autre voyageur, un androïde du type cherish boy, nommé Karel. Confuse de son geste et estimant lui devoir au moins ça, Elle propose à Karel de finir leur trajet en schüber… mais la scoumoune continue. Leur schüber, une IA, refuse de prendre un mécha à son bord. Elle prend conscience que quelque chose doit changer dans ce monde où les androïdes, qui ont pourtant des sentiments, sont considérés comme des machines et utilisés uniquement pour les travaux pénibles. Ils n’ont quasiment aucun droit et sont condamnés à une obsolescence programmée sans autre possibilité d'avenir. Mais parfois arrive l'improbable. La jeune humaine au caractère bien trempé et l’androïde vont tomber amoureux l'un de l'autre. Love love love planche 1Mon avis : Kid Toussaint qui publie pas moins de trois albums chez Dupuis en ce mois de février 2021 (Absolument normal T1 avec Alberto Aurelio Pizzetti, Animal Jack T4 avec Miss Prickly et Love love love T1 avec Andrés Garrido) n'a pas chômé durant le confinement, c'est le moins que l'on puisse dire. Et en matière de communication, il est tout aussi dynamique que ses albums.
    Love, love, love démarre sur les chapeaux de roues grâce surtout à son héroïne prénommée Elle qui, telle un feu follet, ne tient pas en place. Son seul remède semble bien être Karel qui va réussir à canaliser, du moins en partie, l’énergie folle qui l’anime.
    Avec un sujet pareil on aurait pu s'attendre à une histoire à l'eau de rose, eh bien détrompez-vous ! Il y a de l'amour, c'est sûr, même de la part d’un androïde (un thème récurrent en ce moment dans des séries comme West World ou Raised by Wolves mais aussi Avengers sur Disney+ et cet amour improbable entre la sorcière Wanda Maximof et l'androïde Vision), mais la révolte gronde entre humains et androïdes dans le monde futuriste où Kid Toussaint situe son récit.
    Pour Elle c'est du pain bénit compte tenu de son tempérament. Mais cette révolte risque bien de déraper et se transformer en véritable guerre sociale et politique.Love love love planche 2Un scénario très tonique donc, bien servi par un dessin de la même trempe, lui aussi bourré d'énergie, tout comme son découpage, riche en décors flamboyants et légèrement teinté de manga, dû à Andrés Garrido.
    Les personnages sont attachants, les expressions drôles et attendrissantes quand elles ne sont pas poignantes.
    Les couleurs sont bien dosées formant un tout audacieux avec le dessin. 
    Une lecture qui nous fait passer un très bon moment.
    Pour bien comprendre la couverture il ne faut pas hésiter à se plonger dans l'histoire.
    Une BD vivement conseillée.

    SDJuan