Chroniques
Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture.
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MW 90e anniversaire d'Osamu Tezukan
- Par asbl-creabulles
- Le 06/03/2019
MW
Scénario : Osamu Tezuka
Dessin : Osamu Tezuka
Couleurs : <N&B>
Dépot légal : Octobre 2018
Editeur :
Collection : Tezuka 90 ans
Format : Format Manga
ISBN : 978-2-4130-0906-1
Nombre de planches : 592Alors qu'il n'est encore qu'un enfant, Michio Yuki est kidnappé par une bande de jeunes qui l’emmène sur l'île d'Okinomafuné dans le but de soutirer de l'argent à ses parents. Il est confié à la garde de Garai, l'un des membres de la bande, qui le conduit dans leur repaire pour passer la nuit. Là, Garai ressent une attirance sexuelle pour le gamin alors qu’ils attendent les autres membres de la bande qui, en fait, ne les rejoindront jamais. Le lendemain matin lorsqu'ils retournent au village, c’est la désolation. Les oiseaux, le bétail sont morts ainsi que tous les habitants qui semblent avoir agonisé dans d’atroces souffrances. Ils ont été victimes d’un gaz toxique, le MW, que l’US Army a entreposé sur l’île utilisée comme base arrière pour ses opérations au Vietnam. Le gaz s’est accidentellement échappé tuant toute la population à l’exception de Yuki et Garai alors réfugiés dans la grotte. Pris malgré tout d’horribles douleurs, Yuki sera sauvé par Garai. Bien des années plus tard, Garai est devenu prêtre et Yuki travaille dans une banque où il est apprécié de tous. Il est même pressenti par la hiérarchie pour succéder au directeur général. Mais les gens ignorent que derrière cet employé modèle se cache un assassin. Car depuis le dégagement accidentel du gaz MW, Yuki n’a qu’une idée en tête: se venger. Et ce désir de vengeance en a fait un véritable tueur en série. C’est d’ailleurs lui le ravisseur dont tout le monde parle en ce moment car il n’a pas hésité à tuer un gamin en faisant croire à son père qu’il était vivant pour obtenir la rançon avant de le tuer également. Ce ne sera d’ailleurs pas son dernier assassinat mais après chaque meurtre il se rend à l'église où officie Garai pour se confesser. Comme ils sont amants, Garai, bien qu’ayant beaucoup de mal à accepter ses agissements, ne peut se résoudre à le dénoncer à la police. Yuki, lui, a littéralement le comportement d’une personne atteinte d’hystérie, il a besoin de tuer et ses meurtres sont minutieusement préparés et calculés pour assouvir sa vengeance, il semble ne plus avoir aucune limite.
Mon avis: Osamu Tezuka est véritablement un personnage hors normes. Il a ainsi dessiné 170000 planches de 1928 à 1989, soit environ 7,5 planches par jour et 700 titres en tant qu’auteur complet ! Sans oublier ses dessins animés devenus cultes tels que Astroboy et le Roi Léo qui ont bercé notre enfance. S'il y a un mangaka à (re)découvrir, c'est bien Tezuka. Pas étonnant que le Festival d'Angoulême ait consacré en 2019 une exposition à ce dieu de la BD, fondateur du manga moderne.
Ce récit (paru entre septembre 1976 et janvier 1978) est très contestataire et n’a pas vieilli. Il est l’occasion pour Osamu Tezuka d’aborder (tel un précurseur) plusieurs questions sociopolitiques majeures et vivement controversées (encore aujourd’hui pour certaines) et, à travers elles, d’exprimer et de nous faire partager sa colère. Le dégagement accidentel du gaz MW sur une île japonaise lui permet de dénoncer la mainmise américaine sur le Japon et la complicité de ce dernier pendant la Guerre du Vietnam. Avec le personnage de Yuki et ses multiples agissements, il évoque et dénonce la corruption des politiques, les scandales financiers, la ségrégation sexiste d’une société japonaise rétrograde qui (aujourd’hui encore) étouffe les femmes et rejette majoritairement la bisexualité et l’homosexualité, la manipulation des personnes par les émotions y compris ce qu’on appelle le syndrome de Stockholm et tous les troubles psychologiques qui en découlent, etc. Osamu Tezuka nous livre un récit sombre, noir dont le personnage principal est cruel et sans pitié. Seul Garai apporte un peu d'optimisme. Yuki Michio en revanche n'a aucune limite: manque total d'empathie, manipulation et séduction de femmes – telles Mika, la fille de Nakata Eikaku en charge du nettoyage de l’île après l’accident ou Sumiko pourtant amoureuse du père Garai – mais aussi manipulation et séduction d’hommes pour arriver à ses fins. Son allure efféminée lui permet de se travestir pour se faire passer pour les femmes qui ont été ses victimes car en étant vues vivantes elles lui fournissent le meilleur des alibis. MW est bien le récit le plus sombre, le plus dramatique, le plus noir d'Osamu Tezuka. Il fallait oser.
MW est tout à fait caractéristique du style Tezuka. Un mélange habile de pur style manga et de dessin hyper réaliste presque comme de la photographie sans que cela pose le moindre problème de lecture ou de fluidité. Ses cases sont remplies d'énergie, frôlant souvent la caricature dans les scènes d'émotions fortes car il aime exagérer les expressions de ses personnages. Il sait comment guider notre œil pour une lecture rapide ou plus posée lorsqu’il décrit des instants fugaces de calme, de bien-être et de beauté ou des moments plus douloureux voire terrifiants.
MW, cette œuvre emblématique d’Osamu Tezuka, nous est proposée sous forme d’une prestigieuse intégrale de 592 pages (contenant une préface de Patrick Honnoré que l’on retrouve dans chacune des œuvres de Tezuka rééditées) publiée dans le cadre du 90e anniversaire de sa naissance le 3 novembre 1928. Un livre à se procurer sans attendre si vous osez et si vous avez le cœur bien accroché car ce manga plutôt immoral, mélange de thriller et de drame psychologique accumulant les meurtres, les viols, les enlèvements avec rançon, la corruption, le sexe homo, hétéro ou bi est résolument réservé à un public adulte.
SDJuan
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BOUDDHA, la VIE DE BOUDDHA
- Par asbl-creabulles
- Le 05/03/2019
LA VIE DE BOUDDHA
Scénario : Osamu Tezuka
Dessin : Osamu Tezuka
Couleurs : <N&B>
Dépot légal : Octobre 2018
Editeur :
Collection : Tezuka 90 ans
Format : Format Manga
ISBN : 978-2-4130-0906-1
Nombre de planches : 808Un vieil homme tombe d'épuisement. Autour de lui se regroupent un ours, un renard et un lapin. Chacun d'entre eux veut lui apporter de quoi manger mais le lapin revient sans rien et, à la place, il se jette dans le feu en guise de sacrifice. Le vénérable Asita raconte ainsi l’histoire d’un homme qui deviendra l'égal des divinités et aura des facultés hors du commun. Ce récit arrive aux oreilles des Brahmanes (caste sacerdotale) dont un grand nombre sont fatigués de la vie qu'ils mènent au sommet de la société indienne où se sont installés l'orgueil et la discrimination. La mission de trouver cet homme sera confiée à Naradatta. Parti vers le sud pour trouver sa trace, Naradatta subit l'attaque d'un tigre qui finalement le laisse partir. Lorsqu’il arrive au village, les habitants lui indique une personne qui aurait des facultés extraordinaires mais celle-ci se révélera être un charlatan. Non loin de là, un jeune vagabond dérobe à Chaprah, un esclave, l’étoffe qu’il devait livrer à son maître. S'il ne la retrouve pas, son maître vendra sa mère au plus offrant pour payer sa dette. Chaprah découvre finalement le voleur au milieu de sa bande. C’est un "paria" nommé Tatta, au plus bas de l’échelle sociale, plus bas encore que les esclaves, et dont il faut éviter le contact. L’échange de coups ayant mis Chaprah K.O., Tatta accepte de l’hébeger. Après avoir écouté son histoire, Tatta décide de lui venir en aide. Il faut dire que Tatta a la capacité de transférer son esprit dans le corps d'animaux et les manipuler à sa guise tout en les respectant. Il prendra celui d'un tigre pour sauver la mère de Chaprah mais c'est sa famille qui sera tuée lors d'une attaque des hommes de l'armée de Kosala. Chaprah n'en peut plus de supporter sa condition d'esclave et Tatta ne pense plus qu'à une seule chose: se venger.
Mon avis: Osamu Tezuka est un auteur culte au Japon au même titre que le sont pour nous Européens André Franquin (Gaston), Hergé (Quick & Flupke, Tintin), Edgar P. Jacobs (Blake et Mortimer), Peyo (Schtroumpfs), Jean Graton (Michel Vaillant), Jean Giraud/Moebius (Blueberry), Albert Uderzo (Astérix) ou Francisco Ibañez (Mortadelo y Filemón). Delcourt / Tonkam poursuivent la réédition sous forme d’intégrales des principaux chefs-d'oeuvre d'Osamu Tezuka à l’occasion du 90e anniversaire de sa naissance le 3 novembre 1928 à Tokyo.
Osamu Tezuka est l’auteur d’une œuvre colossale principalement en tant que mangaka et scénariste d'animemais aussi producteur. Après "Ayako" et "L'histoire des 3 Adolf", voici le premier tome d’une série de quatre dans lesquels Tezuka nous raconte à sa façon l'histoire de Bouddha, s’efforçant d’être le plus précis et le plus fidèle possible tout en utilisant des personnages somme toute fantastiques. Il fallait bien un auteur de cette trempe pour arriver à nous conter et nous faire partager une histoire d'une telle richesse, pas uniquement de nature spirituelle. D'entrée de jeu, on découvre des personnages qui ne sont pas forcément proches de Bouddha mais qui, au fil des pages, vont prendre tour à tour une place importante auprès de lui. Et pour Osamu Tezuka, raconter ainsi leur trajectoire lui permet d’aborder et de souligner ce qui va être l’un des sujets phares de ce tome, à savoir les différences et les inégalités sociales et les castes. Tous ces personnages vont progressivement prendre de l’importance et nouer des liens forts. On pourrait craindre d’être déconcerté par cette multitude de personnages et ces divagations du scénario, mais le rythme de la narration et le savoir-faire de Tezuka rendent le récit prenant et captivant même pour un lecteur occidental et, d’ailleurs, on ne réalise même plus le nombre élevé de pages qui défilent sous nos yeux. Même le sens de lecture inversé laisse une impression d’aisance et de fluidité dès les premières pages. Ce qui est frappant aussi, c'est que Tezuka raconte la vie des personnages avec une telle facilité qu'on se ne rend compte qu'à la moitié de l'album qu'on n'a pas encore parlé du personnage central, Bouddha, ou plus exactement du prince Siddharta qu’il est encore à ce stade. Une prouesse en somme ! Vous l'aurez compris, on ne le surnomme pas "dieu du manga" pour rien.
Côté illustration, le dessin d’Osamu Tezuka se singularise par sa simplicité et sa douceur. Le mangaka s’efforce d’accorder son dessin à sa manière d’approcher les différents personnages d’où cette alternance de cases dynamiques ou plus lentes. Ceux qui connaissent Astroboy seront frappés par la ressemblance du personnage créé en 1952 avec celui de Tatta. Mais la ressemblance s'arrête là, évidemment. Sachant que l’on demande généralement aux mangaka une très grande productivité, on se rend vite compte qu’Osamu Tezuka a été un surdoué toutes époques confondues, pour avoir pu nous livrer des pages aussi riches, aussi vivantes, aussi réussies, aussi impressionnantes.
SDJuan
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UN PEU DE TARTE AUX EPINARDS
- Par asbl-creabulles
- Le 04/03/2019
Un peu de tarte aux épinards
Tome 1 - Bons baisers de Machy
Scénario : Philippe Pelaez
Dessin : Javier Casado
Couleurs : Javier Casado
Dépot légal : Janvier 2019
Editeur :
ISBN : 978-2-203-15571-8
Nombre de pages : 46Marie-Madeleine Madac Miremont habite le petit village de Machy dans l’Aube. Dans la maison de son père garde-barrière aujourd’hui décédé, elle fait ce qu'elle peut pour s'en sortir avec ses huit enfants, surtout depuis que son mari routier les a abandonnés. Outre divers petits boulots, elle cultive des épinards avec lesquels elle cuisine des tartes qu'elle vend au marché deux fois par semaine. Ses tartes aux épinards n'ont pas beaucoup de succès, c'est le moins qu'on puisse dire. Jusqu’au jour où un colis de Somalie lui est livré par DHL. Elle y découvre d’étranges légumes qu’elle décide de goûter en cachette. C’est une révélation pour elle. Ni une, ni deux, elle en met dans ses tartes. Le lendemain sur le marché, un élu en campagne pour les prochaines élections législatives se laisse tenter par une part de "tarte aux épinards". Soudain, il se met à faire des révélations sur ces élections, criant à qui veut l’entendre qu’elles sont manipulées afin qu’il en sorte gagnant. Mais la plante si étrange arrivée de Somalie n’était pas vraiment destinée à Marie-Madeleine et les véritables propriétaires sont déjà en route pour récupérer leur bien.
Mon avis: Le scénario de Philippe Pelaez démarre fort. Il nous offre un récit drôle et énergique accumulant les péripéties, à mi-chemin entre les films de la saga "Les Tuche" et "Les Vieux Fourneaux", qui accroche le lecteur et dans lequel évoluent divers personnages tous charismatiques. L'héroïne plutôt nunuche, s’exprimant dans un style très libre et agrémenté de multiples dictons farfelus car souvent déformés, mène cette aventure rocambolesque avec entrain. Mieux vaut ne pas se mettre sur le chemin de cette mère isolée à la tête d’une famille atypique et bien soudée, prête à tout pour protéger ses huit enfants.
L'énergie du scénario accroche, c'est certain, mais c'est sans compter avec le trait plaisant, fin, clair et énergique de Javier Casado qui donne toute leur puissance et tout leur dynamisme aux protagonistes de cette aventure. Casado leur donne à tous ou presque une bonne bouille, ce qui les rend tout de suite attachants, et les installent dans une succession de scènes burlesques et drôles sans en faire trop. Il s’est également chargé de la mise en couleurs très vivante et joyeuse. Un premier tome à ne pas rater (puisque qu’il a déjà fait l’objet d’une réédition). Et surtout, si vous avez l’occasion de rencontrer Javier Casado, vous le reconnaîtrez très facilement car c’est une personne sympathique qui vous accueille avec un visage illuminé d'un grand sourire.
Souhaitons à cette nouvelle série le succès qu'elle mérite!
SDJuan
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DANS LES YEUX DE LYA
- Par asbl-creabulles
- Le 28/02/2019
Tome 1 - En quête de vérité
Scénario : Carbone.
Dessin : Cunha
Couleurs : Cunha
Dépot légal : Mars 2019
Editeur :
ISBN : 9791034732630
Nombre de pages : 64
En pleine adolescence, Lya est renversée par une voiture alors qu’elle va avoir 17 ans. Le conducteur du véhicule l’a laissée pour morte au bord de la route. S’il avait fait ce qu'il fallait au lieu de fuir, elle ne serait pas paraplégique et condamnée à rester en fauteuil roulant pour le reste de sa vie. Mais Lya a la volonté de vivre et espoir dans l’avenir. Et le hasard va la conduire à trouver un document révélant que le coupable a été en contact avec ses parents auxquels il a offert de payer ses soins en échange de leur silence. Après des études brillamment menées, elle entre quatre ans plus tard au service d’un prestigieux cabinet d’avocats comme stagiaire, celui-là même qui s’était occupé de son accident. Bien décidée à retrouver le coupable, il n’y a plus qu’à mettre la main sur le dossier pour connaître son nom et lui faire payer son geste mais dans son état et compte tenu de son handicap, elle a besoin d'aide pour arriver à ses fins.
Mon avis: Depuis son fauteuil roulant, l'héroïne de Carbone (également scénariste de la nouvelle série "La Boîte à Musique" illustrée de façon dynamique, expressive et colorée par Jérôme Gillet, alias Gijé) a du pain sur la planche. Carbone nous propose un scénario qui frappe fort. Elle nous montre les difficultés et obstacles que rencontre une jeune handicapée moteur dans la vie courante. Obstacles que Lya va s’efforcer de surmonter d'une manière ou d’une autre et c'est là que l'imagination de la scénariste fait mouche. Avec de la subtilité, de la ruse ou... de la chance, l'héroïne va même réussir à tirer les ficelles pendant un certain temps. Je n'en dirai pas plus pour préserver le suspense qui est très bien dosé. L'intrigue s'intensifie au fil d’une lecture captivante qui, je n’en doute pas un seul instant, permettra à la série de trouver son public, ados et plus …
Les illustrations de Justine Cunha sont globalement très agréables. Elle réussit à donner du tonus à cette jeune fille malheureusement clouée dans son fauteuil roulant qui devient, au final, invisible. Passionnée d’animation, de manga et de bande dessinée, Justine Cunha confesse avoir un artiste fétiche dont elle adore le style et les couleurs: l’américaine Mary Blair qui a été dessinatrice/aquarelliste chez Disney et de livres pour enfants. Cela lui permet de nous proposer des personnages très charismatiques dont elle travaille les expressions, les réactions, les vêtements, etc.
Avec une touche de manga, des couleurs chatoyantes et des personnages sympas, on sent une terrible énergie se dégager du premier tome intitulé "En quête de vérité" de cette nouvelle série parue chez Dupuis. Bravo aux deux auteures.
SDJuan
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IN ONE'S LAST MOMENT
- Par asbl-creabulles
- Le 28/02/2019
One shot
Scénario : Kentaro Fukuda
Dessin : Kentaro Fukuda
Couleurs : N&B
Dépot légal : novembre 2018
Editeur :
Format : format manga
ISBN : 978-2-302-07281-7
Nombre de pages : 200
"Il y a autant de façons de mourir que d’êtres humains en ce monde…"Enfant, Mamoru Kaname découvre qu’il possède un don étrange. Un simple contact physique avec une personne lui permet de prédire sa mort. Mais ce don se transforme vite en une malédiction car après avoir vu la mort de son père et prévenu sa mère qui ne l’a pas cru, il découvre qu’il est dans l’incapacité de le sauver. Cette révélation et cette impuissance face à la fatalité vont le persuader de tout faire pour sauver les autres. Cela lui vaudra plus tard le surnom de "Dieu de la mort". Mais s’il est persuadé de pouvoir changer les choses en prévenant la future victime bien en amont, cela ne se passe pas vraiment comme il l'imagine. En effet, même s’il réussit à la sauver, la mort en décide autrement. Et si elle ne peut avoir la personne prévenue par Mamoru, elle prend la vie de quelqu'un d'autre. De plus, il semble que Mamoru doive en payer le prix: des modifications physiques apparaissent sur son corps sous forme de taches noires. Et surtout, il est seul et isolé car personne n’ose le toucher. Mais lorsqu'à l’occasion d’une fête, il touche la main de son amie Kana Shiraishi et "voit" aussitôt qu’elle va bientôt mourir, il décide d'intervenir coûte que coûte. Sauf que sa copine Takeshita, risque bien d'en pâtir. Pourtant une surprise l'attend.
Mon avis: On ne peut s’empêcher de penser à la série de films d’horreurs que le cinéma américain nous a proposée pendant plus de dix ans dans lesquels le héros, qui lui aussi a des visions, s’efforce de sauver les futures victimes tout en constatant que la mort les rattrape puisque tel était leur destin. Dans le one shot de Kentaro Fukuda, la grande faucheuse, contrairement à Destination Finale, a besoin d’autres victimes faisant de ce récit une histoire riche en rebondissements et en surprises. Elle commence sur les chapeaux de roues pour ne plus s'arrêter et nous interpelle car qu'aurait-on fait à la place du héros? Le choix de se limiter à un one shot est audacieux car de multiples possibilités s’offrait à l'auteur sur ce thème aussi sérieux et, du coup, cela semble développé de manière un peu superficielle et, surtout, on aurait aimé avoir davantage de réponses. Espérons que d’autres récits sont déjà en route.
Coté dessin, Kentaro Fukuda s’en tient aux codes du manga et l'énergie est bien présente. Les flashs de la mort des personnes que le héros touche, sa panique et sa rage à vouloir prévenir ses ami(e)s sont restitués de manière efficace et impressionnante. Le trait est précis, les cases plutôt détaillées et les personnages aisément reconnaissables même si on peut regretter une certaine dureté dans leur allure générale. Encore un manga qui me conforte dans l’idée qu’il y a du bon dans le genre.
SDJuan
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DUKE 3
- Par asbl-creabulles
- Le 27/02/2019
Tome 3 - Je suis une ombre
Scénario : Yves H.
Dessin : Hermann
Couleurs : Hermann
Dépot légal : Janvier 2019
Editeur :
Format : Grand format
ISBN : 978-2-8036-7475-6
Nombre de pages : 56Nous avions laissé Morgan "Duke" Finch, à la fin du tome 2, avec une mission délicate: garantir la sécurité d’un convoi avec à son bord 100.000 dollars. La mission lui a été confiée par Mullins, un homme puissant aussi riche qu’imprévisible. Il ne faut pas attendre bien longtemps avant de voir qu’un arbre bloquant la route, ça sent le piège à plein nez. Duke est alors prêt à dégainer son arme, à sortir son permis de tuer et à plomber quelques âmes ne le connaissant pas encore. Le Diable va encore avoir un colis de la part de Morgan Finch. Il est prêt à titiller la gâchette jusqu’à ce qu’il se rende compte que c’est son propre frère qui attaque le convoi… Il décide de ne pas intervenir, de laisser son frère et sa bande s’enfuir. Ce n’est pas pour autant qu’il lâche l’affaire! Le but est de récupérer l’argent mais sans que le sang coule. Lorsque dans votre vie la couleur rouge a toujours été omniprésente, il est difficile d’y échapper… Ce livre utilise les codes bien connus du western: une chasse à l’homme, des coups bas, des fusillades, du sang et la mort qui rôde… Place à l’aventure!
Mon avis: Toutes les personnes qui me connaissent savent que je suis un fan inconditionnel d’Hermann. Cela ne changera pas après la lecture de cet album. C’est noir, c’est beau et ça percute. Point à la ligne. Et la scène de Duke sous la pluie, quel talent! C’est à couper le souffle. Il est certain que la série ne bouscule pas les codes du western mais c’est un bon album. Une dernière chose: la couverture de l’album est juste magnifique et rien que pour cela, allez l’acheter!
MJordan
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AQUAMAN REBIRTH 3 & 4
- Par asbl-creabulles
- Le 25/02/2019
Tome 3 . Underworld
Scénario : Dan Abnett
Dessin : Stjepan Šejić
Couleurs : Stjepan Šejić
Dépot légal : Août 2018
Editeur :
Collection : DC Rebirth
Format : Format comics
Nombre de pages :152Tome 4 - Détrôné
Scénario : Dan Abnett
Dessin : Max Fiumara et Riccardo Federici
Couleurs : Dave Stewart et Sunny Gho
Couverture : Joshua Middleton
Dépot légal : Novembre 2018
Editeur :
Collection : DC Rebirth
Format : Format comics
Nombre de pages :120 -
AMER BÉTON
- Par asbl-creabulles
- Le 22/02/2019
Amer Béton
Scénario : Taiyou Matsumoto
Dessin : Taiyou Matsumoto
Couleurs : <N&B>
Dépot légal : Janvier 2019
Editeur :/Tonkam
Collection : Découverte
ISBN : 978-2-7595-0007-9
Planches : + de 600Noiro et Blanko sont deux orphelins inséparables qui vivent ou plutôt survivent, perchés la plupart du temps – d’où leur surnom familier de "Chats" – sur les toits ou les poteaux d’un quartier de Takara où règnent la pauvreté et la violence. Ils survivent comme ils peuvent de divers petits larcins mais surtout règlent leur compte à tous ceux qui cherchent à s'approprier leur territoire, véritable périmètre de survie auquel il ne faut pas toucher. Si Noiro est un pragmatique, Blanko est plutôt un rêveur peu débrouillard. Une chose est sûre, ils ne peuvent vivre l'un sans l'autre. Un jour, un groupe de Yakuzas mené par Suzuki que tout le monde surnomme le Rat, prétend s'emparer du quartier pour y écouler sa drogue, ce qui équivaut à envahir le territoire des Chats mais aussi celui des Apaches que dirige un certain Chokola. Kimura, l’homme de main de Suzuki, est chargé d'expliquer à Chokola qu'il n'est plus le caïd du quartier mais qu'à présent il devra vendre la drogue pour lui et les yakuzas de Susuki. Noiro et Blanko ont toujours évité d'interférer dans les histoires de gangs, mais cette fois Noiro, même s'il n'apprécie pas trop Chokola, sent bien que son quartier ne sera plus le même si les yakuzas l'envahissent.
Mon avis: Voici un gros volume compilant près de 600 pages qui nécessitera sans doute pour certains, comme ce fut le cas pour moi, un bon moment de lecture afin d’"entrer" dans un graphisme pour le moins surprenant et perturbant quand on est davantage habitué au style franco-belge, comics ou même manga. Mais une fois "captée" la griffe Taiyou Matsumoto, on se sent transporté, absorbé, happé comme cela se produit rarement. Là où on pourrait croire que tout est confusion et désordre, en réalité on découvre un découpage et une mise en scène efficaces. Les cases s’enchaînent, se coupent, s'entrecoupent à l’infini sur fond de décors riches – chargés diront certains – en détails. Mais cela ne gêne en aucune façon la lisibilité du récit. On va à l'essentiel, là où l'auteur veut que notre œil se pose! Les scènes d'action, souvent très violentes, sont superbement rendues, avec un dynamisme à couper le souffle.
Les personnages sont charismatiques à souhait. Blanko, un peu attardé, est largement mis en avant car il aime parler, penser tout haut, écrire des paroles de chanson, donner son avis sur tout. Quant à Noiro, il est plus taiseux, plus pessimiste, plus cérébral jusqu’au moment où il passe à l'action de manière soudaine et souvent très violente. La venue des yakuzas ne sera pas pour arranger les choses, au contraire. L'un ne va pas sans l'autre, un peu comme l'ombre et la lumière, le blanc(o) et le noir(o). On retrouve ici la notion d’opposés où chaque chose a besoin de son contraire et chacune a besoin de l'autre pour ne faire qu'une et se compléter. Leur seul repère se situe dans les rues de Takara où ils ont appris à survivre mais avec un code d'honneur qui leur est propre. Pour la ville, Taiyou Matsumoto a créé un univers de béton, chasse gardée de nos deux Chats que d’autres veulent grignoter, qui se présente comme un personnage à part entière et qui évolue tout autant que Chokola, le grand-père devenu SDF, les yakuzas ou les policiers. Chaque personnage, même secondaire, a son importance dans ce récit habilement pensé et construit. Difficile d’en décrocher même lorsqu’on ressent le besoin de faire une pause après avoir lu une centaine de pages ! Pas étonnant que le Festival d'Angoulême lui ait consacré une exposition lors de son édition 2019.
Je n'ai pas aimé cette intégrale en (amer) béton, je l'ai adorée !
SDJuan