Mon avis: Avec ce deuxième tome de Contrapaso intitulé Pour adultes, avec réserve, Teresa Valero poursuit avec brio sa fresque journalistico-policière dans l’Espagne franquiste, mêlant enquête, critique sociale et surtout mémoire historique. Le titre est explicite, la vérité dérange surtout quand elle bouscule les fondements d’une société entièrement sous contrôle.
Cet album adopte une tonalité encore plus sombre. Les dialogues y sont particulièrement travaillés. Les tensions politiques affleurent à chaque page et la condition féminine devient un fil rouge puissant. Valero s’attaque de front à l’hypocrisie d’un pouvoir patriarcal étouffant, tout est contrôlé par le régime, la presse est muselée, les libertés individuelles bafouées, les victimes réduites au silence et la moindre vérité aussitôt jugée subversive.
Contrapaso est un polar dense, nerveux, très documenté où l’intime croise le politique. Lenoir, plus idéaliste que jamais, et Sanz, toujours tiraillé entre prudence et colère, forment un duo profondément humain et vont peu à peu être rattrapés par les secrets et les traumatismes du passé.
Riche, fin et expressif, le dessin de Teresa Valero sert admirablement ce climat d’étouffement. Sa gestion de la lumière et des ombres, des intérieurs oppressants et des visages tendus, tout contribue à donner au récit une tension presque palpable. Le style est très cinématographique comme pour souligner l’évocation même du cinéma espagnol tout au long du récit.
Les couleurs douces contrastent avec la dureté des thèmes abordés pour souligner le décalage entre les apparences et la réalité.
Un dossier en fin d'album à lire pour encore plus s'imprégner de l'époque.
SDJuan