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INTERVIEW ALEX MACHOAlex macho

Pour commencer, une question personnelle : comment avez-vous vécu la pandémie de Covid-19 ? Vous a-t-elle impacté dans votre travail ?
Je pense l’avoir vécue comme presque tout le monde, d'abord avec peur et incertitude et ensuite avec beaucoup de résignation et de prudence. En général, ce sont des moments difficiles pour ceux qui travaillent et une sorte d’inquiétude flotte dans l'air, mais je dois avouer que le début de la pandémie a coïncidé avec le début de mon travail sur Féroce. Sincèrement, en entamant un nouveau projet, et encore plus s’agissant du thriller captivant écrit par Gregorio Muro Harriet avec l’appui de Philippe Hauri, j’ai pu traverser les moments les plus difficiles de la pandémie en voyageant mentalement dans les paysages froids et enneigés de Féroce et en mettant provisoirement les mauvaises nouvelles de côté.

Quand avez-vous commencé à lire des bandes dessinées ?
Mon Dieu, je crois me souvenir que j'étais encore en train d'apprendre à lire quand j’ai totalement succombé à la magie de ces suites d’images et de dessins qui créaient un monde fantastique. J'ai eu la chance d'avoir quelques BD à la maison dès mon plus jeune âge et si vous ajoutez à cela que mon père était dessinateur/illustrateur, la boucle est bouclée.

Quelle a été votre première BD et pourquoi vous en souvenez-vous en particulier ?
Je ne me rappelle pas vraiment si c'était la première, la deuxième ou la dixième, mais en tout cas c'est l'une de celles qui m'ont marqué à jamais: "The Lone Ranger" créée par le scénariste Fran Striker et adaptée en "comics" et aussi en série télé. Je peux également citer la collection espagnole "Los mejores comics del oeste" qui publiait des histoires de "Lieutenant Blueberry", "The Cisco Kid", "Gringo" ou "La légende d'Alexis Mac Coy" entre autres.

Los mejores comics del oeste 2

Quelles ont été et quelles sont vos influences, si vous en avez ? Et plus précisément en matière de BD ?
Comme je l'ai dit, le western m'a captivé dès mon plus jeune âge, mais je lisais aussi d'autres catégories de bandes dessinées et ce qu'on appelle en Espagne TBO. [TBO est le nom d’un magazine BD devenu le terme générique désignant la BD. Il est aussi orthographié "tebeo"] Mes influences de jeunesse sont donc diverses. Plus tard, je me suis intéressé à toutes sortes de genres aussi bien du monde des super-héros que de la bande dessinée ou du roman graphique avec des auteurs de premier plan comme Giraud, Jordi Bernet, Will Eisner, Antonio Segura, José Luis Salinas, John Cullen Murphy, Carlos Pacheco, Sean Gordon Murphy, José Luís Munuera ou Guarnido entre autres.

Quel a été votre premier travail de dessinateur ?
Si je me souviens bien, c’était quelque chose en rapport avec l'illustration pour enfants. J'ai commencé très jeune, j'étudiais encore et je faisais des travaux d'illustration pour gagner de l'argent et aussi parce que le monde de l'édition me fascinait.

Pouvez-vous nous parler de vos premiers contacts avec Gregorio Harriet et Garluk Aguirre? Aviez-vous envie de travailler avec eux ou est-ce l'éditeur qui vous a mis en relation ?
Un jour, j'ai reçu un appel d'un collègue, Joanes Urkixo, qui est aussi un ami commun avec Gregorio. Il m’a demandé si je voulais faire des essais pour la préparation de projets avec Gregorio Muro Harriet et ça s’est fait naturellement. Gregorio avait une foule de projets tous plus alléchants et intéressants les uns que les autres, mais le travail s’annonçait difficile et nous allions avoir besoin d'aide pour les couleurs. En cours de route est apparu notre collègue Garluk, grand dessinateur et coloriste. Nous lui avons soumis nos projets et il a rejoint l’équipe sans hésiter. C'est comme ça que notre voyage dans le monde de la BD a commencé il y a quelques années.

La honte et l oubli 1En ce qui concerne la documentation, comment procédez-vous ? À partir de recherches dans des livres personnels ou en bibliothèque ou bien sur internet ? Avez-vous ensuite tout partagé avec Gregorio ou Garluk ou bien vous êtes-vous aussi documenté de votre côté ?
De fait, c'est Gregorio qui s’occupe en majeure partie de cette question. Il se charge de fournir l’essentiel de la documentation accompagnant le scénario et ensuite, le cas échant, je la complète avec d’autres documents qui me permettent d’affiner certains détails. Aujourd'hui, avec internet c’est plus facile de trouver ce dont on a besoin qu’il s’agisse d’images, de vidéos, de textes, etc. mais, à l'occasion je consulte aussi des livres ou des magazines, même si c'est de moins en moins fréquent. Je tiens à préciser que si j'aime me documenter et être fidèle à la réalité, je n'aime pas rester enfermé et copier en permanence. J'ai besoin de m'imprégner de l'histoire, du lieu et de l'environnement pour laisser libre cours à mon imagination et rendre l’histoire palpable et vivante.

Comment travaillez-vous avec Gregorio? Il vous passe le scénario page par page ou plusieurs à la fois?
Je dois dire que c'est un plaisir de travailler avec Gregorio et au fil du temps nous avons atteint une sorte de symbiose pour le développement d’un projet. Généralement, il me donne d’abord un résumé de l'histoire pour que je puisse m’en imprégner, puis il me passe un canevas contenant plus de détails et de personnages; je commence alors par quelques croquis et les premières esquisses de personnages, puis je développe l’histoire en suivant le scénario page par page, pratiquement d'affilée. C’est le début d’un travail d’équipe qui nous permet d’aboutir à un résultat de la plus haute qualité possible, en assemblant les différentes pièces jusqu'à ce qu’on sente que l'histoire prend forme et tient la route.

FeroceAimeriez-vous travailler avec un autre scénariste (franco-belge ou américain) en particulier?
C’est une question délicate à laquelle je ne vais pas savoir comment répondre maintenant.
J'aimerais pouvoir travailler sur de bonnes histoires, sur des projets qui me passionnent et m'attirent, sur des scénarios qui me surprennent et me donnent du plaisir. Si j’avais le choix, aujourd'hui je choisirais une bonne histoire à raconter et à dessiner.

Sur quels critères choisissez-vous le scénariste et le coloriste ? Est-ce l'éditeur qui vous les impose ? Cela dépend-il de l'histoire que vous voulez raconter ?
Nous avons nous-mêmes constitué l’équipe actuelle sans aucune intervention de la maison d’édition, mais je sais que l’on peut travailler et créer des équipes de différentes manières, mais comme je vous l'ai dit, jusqu'à présent cela n'a pas été mon cas.

Quel est le style d'histoire que tu aimes dessiner ou que tu aimerais dessiner ?
J'aime les histoires fortes, avec des personnages consistants et ayant du caractère, qui s’appuient sur une intrigue convaincante, contenant une certaine magie qui surprend, qui suscite de l’émotion et, si possible, qui nous emmène quelque part et donne à réfléchir une fois la dernière page tournée.

Qu'avez-vous lu dernièrement et qu'avez-vous aimé et pourquoi ?
Je viens de lire Contrapaso de Teresa Valero. C’est l’une de ces histoires qui surprend sans que l’on s’en rende compte. Son style graphique, ses personnages et son scénario me semblent tout simplement magnifiques.

ContrapasoAvez-vous beaucoup d'histoires en préparation ?
J’ai quelques histoires sous le coude, que j’aime et dont j'ai besoin de savoir qu'elles sont là, mais je préfère travailler à 100% sur le projet en cours jusqu'à ce qu’il soit pratiquement terminé. J'ai du mal à porter plusieurs projets en même temps.

Merci beaucoup d’avoir répondu à nos questions et je tiens à redire que vous nous avez offert une BD de très bonne qualité ! Vous formez à vous trois une équipe artistique hors du commun !
C’est moi qui vous remercie. J'espère que nous pourrons vous proposer d'autres bonnes histoires ces prochaines années.
Je n'en doute pas une seconde !

SDJuan

Date de dernière mise à jour : 24/09/2021

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