47e Festival international de la bande dessinée d’Angoulême
(30 janvier > 2 février 2020)
Depuis sa création en janvier 1974, le Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême est devenu incontournable pour tous les passionnés de BD. Il revêt cette année un intérêt particulier car il constitue le premier événement de "l’année de la BD" que le ministre français de la culture Franck Riester a décrétée pour 2020.Pour sa 47e édition, le Festival international de la bande dessinée (FIBD) d’Angoulême nous offre comme en 2019 un trio d’affiches visant à souligner la très grande richesse du 9e art. Les trois affiches 2020 sont dues à la japonaise Rumiko Takahashi (Grand Prix 2019), à la dessinatrice française Catherine Meurisse (à qui le festival consacre une exposition rétrospective proposant plus de 150 planches, dessins, manuscrits originaux, vidéos et inspirations à voir au Musée du Papier) et à l’américain Charles Burns (Black Hole, Toxic). Elle ont été réalisées sur le thème d’un "autoportrait de l’artiste en enfant, découvrant la ou les bandes dessinées fondatrices de sa passion, voire de sa vocation".Le festival propose comme toujours une grande variété d’activités – expositions, conférences-débats, masterclasses, ateliers, séances de dédicaces ... – réparties dans toute la ville d’Angoulême et même, cette année, un "concert dessiné" sous forme d’une rencontre en direct sur la scène de la salle Buñuel de l'Espace Franquin de deux artistes, le chanteur et musicien Hugh Coltman et le dessinateur Juanjo Guarnido. La diversité est l’une des qualités de cet événement et explique sans aucun doute pourquoi les visiteurs viennent à Angoulême du monde entier. D’autre part, force est de constater que le marché (francophone) de la BD se porte bien et fait preuve de dynamisme comme en témoigne la croissance continue des ventes (+ 11% en 2019): albums classiques, Astérix, Blake & Mortimer, Le Chat, Largo Winch notamment, mais aussi et surtout le manga qui augmente régulièrement sa part de marché et quelques albums jeunesse. Mais beaucoup de spécialistes estiment que c’est d’abord la multiplication des titres (près de 5600 par an contre 800 dans les années 1990) qui gonfle le chiffre d’affaires de l’édition puisque dans la réalité les ventes moyennes par titre ont plutôt tendance à diminuer et les auteurs des difficultés à vivre de leur travail.
ART EN GRÈVE: Cette situation contradictoire a été à l’origine le 31 janvier d’une manifestation d’auteur(e)s qui ont déposé le crayon pour se rassembler autour du buste d’Hergé afin de dénoncer la précarité dans laquelle vivent beaucoup d’entre eux et, surtout, beaucoup d'entre elles. Ils ont surtout dénoncé le système du forfait quasi imposé par les éditeurs (qui n'hésitent plus à proposer seulement de 2 à 5000 € pour un album de plus de 100 pages ayant nécessité parfois plus d’une année de travail) mais aussi la faiblesse des droits d’auteur (8 à 10%) quand ils en reçoivent. Alors que la BD ne cesse d’accroître ses ventes, rien ne semble arrêter la chute des rémunérations et si l’on y ajoute l’accès aux droits sociaux, la transition vers l’URSSAF, le retard du rapport Bruno Racine destiné à améliorer la situation des artistes-auteurs, on comprend que la réalité, souvent ignorée du public, puisse conduire à de telles actions symboliques.
La BD connaît certes des dysfonctionnements mais ne gâchons pas trop le plaisir de participer à un événement qui reste exceptionnel car il s’agit avant tout d’une fête réunissant en un même lieu de quoi satisfaire largement tous les goûts et donner la possibilité à chacun(e) de découvrir en chair et en os ses auteur(e)s préféré(e)s, éventuellement d’échanger quelques mots et, cerise sur le gâteau, d’obtenir une dédicace en bonne et due forme.
Comme toujours, Angoulême propose une multitude d’expositions (liste complète sur le site du festival https://www.bdangouleme.com/) parmi lesquelles plusieurs à ne pas rater:
- LEWIS TRONDHEIM FAIT DES HISTOIRES, plus de 150 originaux reprenant tous les genres abordés par l’auteur, western, polar, autobiographie, comédie sentimentale, cape et épée, BD expérimentale, BD jeunesse, heroïc fantasy, science-fiction. Trondheim est le créateur du "Fauve" devenu la mascotte du Festival. Exposition à voir au Musée de la bande dessinée jusqu'au 10 mai 2020
- ROBERT KIRKMAN, WALKING DEAD ET AUTRES MONDES POP, une vaste exposition retraçant vingt années de créations originales (Walking Dead, Invincible, Outcast) notamment pour Image Comics, à voir à la Médiathèque L'Alpha
- CATHERINE MEURISSE, CHEMIN DE TRAVERSE, dessinatrice de presse, illustratrice de livres jeunesse mais aussi auteure de bande dessinée (Mes hommes de lettre en 2008, Le pont des Arts en 2012, Les Grands Espaces en 2018) à voir au Musée du Papier jusqu'au 1er mars 2020
- YOSHIHARU TSUGE, ÊTRE SANS EXISTER, exposition d’originaux du mangaka à la fois scénariste et dessinateur resté jusqu’ici peu connu et pourtant figure majeure de la bande dessinée mondiale, à voir au Musée d'Angoulême jusqu'au 15 mars 2020
- GUNNM, L'ANGE MÉCANIQUE, exposition autour de Gunnm puis Gunnm - Last Order, l’œuvre fleuve du mangaka Yukito Kishiro racontant les aventures de la cyborg Gally, à voir à l’Espace Franquin
- DANS LA TÊTE DE PIERRE CHRISTIN, une large rétrospective du travail exceptionnel réalisé par le scénariste Pierre Christin, lauréat du Prix Goscinny 2019, à voir au Vaisseau Moebius
- JEAN FRISANO - DE TARZAN À MARVEL, L’AMÉRIQUE FANTASMÉE, les différents anniversaires Marvel (80 ans en août 2019) et de ses filiales européennes (en France Lug avec la revue Fantask, 50 ans et Semic, 30 ans) sont l’occasion de révéler le travail de Jean Frisano, artiste méconnu du grand public. Pourtant, ses gouaches colorées restent imprimées sur la rétine de milliers de Français qui ont découvert les superhéros Marvel dans les années 1970 et 1980 avec le magazine Strange. C’est lui qui, en effet, en réalisait la plupart des couvertures pour le marché français. Exposition à voir au Vaisseau Moebius
- NICOLE CLAVELOUX: QUAND OKAPI RENCONTRE MÉTAL HURLANT, illustratrice de récits pour adultes et albums jeunesse et du magazine Okapi, Nicole Claveloux a depuis le début des années 1970 publié plus de 60 ouvrages. L’exposition met en lumière son travail fondateur et éclectique, à voir à l’Hôtel Saint Simon.
- LES MONDES DE WALLACE WOOD, Illustrations, planches et objets font partie de cette exposition. L'auteur aux multiples facettes a déjà reçu en 1977 le prix du dessinateur étranger. À voir au Musée d'Angoulême jusqu'au 15 mars 2020
On a même pu voir cette année le Président Emmanuel Macron poser en tenant un tee-shirt dénonçant les tirs de LBD sur lequel figure un fauve éborgné avec la mention "LBD 2020" offert par le dessinateur Jul. Le président a toutefois bien précisé que s’il est en désaccord complet avec l’approche du dessinateur, il a accepté cette photo au nom de la liberté d’expression et de la créativité qui peut s’exercer dans un pays libre et démocratique qui aime l’insolence.
PALMARÈS DU FESTIVAL D’ANGOULÊME 2020
- Grand Prix du Festival d’Angoulême: Emmanuel Guibert pour l’ensemble de son œuvre
- Prix spécial/fauve d’honneur du Festival d’Angoulême: Robert Kirkman, le scénariste entre autres de "Walking Dead" et "Invincible" (série qui vient de s’achever avec le tome 25 paru en octobre 2019)
-Prix du meilleur album (Fauve d’Or): "Révolution" T1 de Florent Grouazel et Younn Locard (Actes Sud BD)
-Prix spécial du Jury: "Clyde Fans" du canadien Seth (Delcourt)
-Prix Révélation: "Lucarne" du britannique Joe Kessler (L’Association)
-Prix de la série: "Dans l’abîme du temps" du mangaka Gou Tanabe et de H.P. Lovecraft (Ki-Oon Ed.)
-Prix Jeunesse: "Les Vermeilles" de Camille Jourdy (Actes Sud BD)
-Prix Jeunes Adultes: "Le Tigre des Neiges" d'Akiko Higashimura (Le Lézard Noir)
-Prix de l’audace: "Acte de Dieu" de l’italien Giacomo Nanni (Ici Même)
-Prix du public France Télévisions: "Saison des Roses" de Chloé Wary (Éd. FLBLB)
-Prix polar SNCF: "No Direction" d’Emmanuel Moynot (Sarbacane)
-Prix du patrimoine: "La Main verte et autres récits" de Nicole Claveloux et Édith Zha (Cornelius) (1ère édition parue en 1978 chez Les Humanoïdes Associés)
-Prix des Libraires: "Les Indes Fourbes" de Juanjo Guarnido et Alain Ayroles (Delcourt)
-Prix de la BD alternative: "Komikaze" 18, fanzine produit par la croate Ivana Armanini
-Prix René Goscinny: "Le dernier atlas" de Gwen de Bonneval et Fabien Wehlmann (Dupuis)
-Fauves d’honneur: Nicole Claveloux et Yoshiharu Tsuge
-Prix de la BD chrétienne: Martin Jamar pour "Foucauld" (Dargaud)
FPatrick & SDJuan
Prix de la BD Chrétienne remis à notre ami Martin JAMAR
Date de dernière mise à jour : 03/02/2020
Ajouter un commentaire