Créabulles, Expositions, Dédicaces, Rencontres.

Chroniques

Quelques-unes des BD qui nous ont le plus marqués.
N’y voyez aucun a priori, aucune prise de tête, aucune volonté de gonfler nos egos mais tout simplement l’envie de vous faire partager nos impressions de lecture. 

  • JOHAN ET PIRLOUIT 2 (à l’italienne) – Intégrale Niffle

    Johan et pirlouit 2Scénario: PEYO
    Dessin: PEYO
    Couleurs: N&B
    Editions Niffle
    Collection : La Grande Bibliothèque
    ISBN : 978-2-87393-075-2
    Dépot légal : novembre 2019
    Nombre de pages : 352

    Étonnant comme cette collection à l’italienne qui présente chaque aventure sur demi-planche donne au lecteur une autre approche dans sa lecture.
    Les bêtises de Pirlouit semblent durer plus longtemps et c’est un plaisir.
    Tout le récit ayant plus d’espace avec ses grandes cases semble présenter des strips absents des éditions normales et pourtant ils y sont aussi.
    Merci à Frédéric Niffle d'avoir créé cette prestigieuse collection. Johan et pirlouit 2 planche
    M. Destrée

    Note Créabulles : Les demi-planches sont au format des originaux : 392mm x 278 mm dans un boitier.

  • EVARISTO Intégrale

    EvaristoScénario : Carlos SAMPAYO
    Dessin : Francisco SOLANO LOPEZ
    Couleurs : N&B
    Dépot légal : Août 2019
    Editeur : Éditions iLatina
    Collection : Grandes Autores
    ISBN :978-2-491-04200-4
    Planches : 189
    Autres infos : prologue de Pablo de Santis (2 pages) et notes explicatives (2 pages) en fin d'album. 

    Ici, ce n’est pas la couverture qui m’a poussé à acheter ce livre.
    Grâce à Michel Deligne, j’ai rencontré Francisco Solano López il y a pas mal d’années. Dessinateur argentin très sympathique. Il publiait une aventure SF dans Spatial.
    Depuis j’aime son dessin et même si les histoires présentées ici sont parfois trop courtes et si la traduction est légère, le commissaire Evaristo est intègre et bien sympathique.
    Et j’aime beaucoup le dessin.Evaristo plancheLivre seulement disponible à la librairie Brüsel.

    M.Destrée

  • UDERZO l'irréductible - Entretiens avec Uderzo

    Asterix cie entretiens avec uderzoScénario : Numa SADOUL
    Dessin : Albert UDERZO
    Couleurs :<N&B>  <Quadrichromie>

    Dépot légal : Octobre 2019
    Editeur : Hachette
    Format : Autre format
    ISBN : 978-2-01-400116-7
    Planches : 264

    Une Bible!
    Vous saurez tout, presque tout sur Uderzo grâce à cette réédition des entretiens de Numa Sadoul avec Alberto Uderzo.
    Des heures et des heures de lecture intéressantes et confidentielles.
    Mais Numa, j’ai quand même quelques questions :
    1. Avez-vous relu les différentes interviews ? Car certaines réponses entre la première sur 3 jours et celle de 2014, sont identiques presqu’au mot près.
    2. Dans le passage en revue de toutes les aventures, pourquoi ne pas avoir demandé à Uderzo pourquoi les pages de garde d’Astérix en Corse sont différentes ?Uderzo l irreductible entretien avec uderzo
    Réponses de Numa Sadoul :

    1/ Où est le problème ? Je respecte les réponses. Si elles sont identiques à 40 ans de distance, cela indique une certaine cohérence chez Uderzo.
    2/ Bonne question : parce que je n’y ai pas pensé !
    3/ Si, si, ils existent. Mais l’éditeur a simplement oublié de les publier. Tout comme la page dédicace et remerciements a été oubliée. Et moi, honte sur moi, je n’ai pas remarqué ces oublis en corrigeant mes épreuves ! Ce sera rajouté à une prochaine réimpression ; donc, achetez ce livre en masse, pour qu’il s’épuise et se réédite vite!

    M.Destrée & Numa Sadoul

  • BATMAN - Le Culte

    Batman le culteScénario : Jim Starlin, Jim
    Dessin : Berni Wrightson
    Couleurs : Bill Wray
    Encrage : Berni Wrightson
    Couverture : Berni Wrightson
    Dépot légal : Août 2016
    Editeur : Urban Comics
    Collection : DC Deluxe
    Format : Format comics
    ISBN : 978-2-365-77921-0
    Planches : 208

    En relisant la nouvelle intégrale de "La Créature des Marais" (The Swamp Thing), je découvre que Berni Wrightson a dessiné un Batman... Je n’étais pas au courant.
    Le voilà.
    Le dessin est parfois plus rapide mais on reconnaît souvent la patte du maître. 
    Quelques dessins pleine page sont impressionnants.
    Le scénario n’a rien à envier aux autres one shot de notre héros de la nuit.Batman le culte planche
    Batman est prisonnier d’un despote qui règne sur le peuple des démunis réunis dans les bas-fonds de Gotham.
    Il se sert d’eux pour devenir le maître de la ville.
    Et il veut détruire Batman et va presque réussir mais Robin veille…

    M.Destrée

  • NJINGA - Les Reines de Sang

    Njinga La Lionne de MatambaLa Lionne du Matamba - Tome 1/2
    Scénario : Jean-Pierre PÉCAU
    Dessin : Alessia DE VINCENZI
    Couleurs : Nurya SAYAGO
    Dépot légal : Septembre 2020
    Editeur : Delcourt
    Collection : Les Reines de Sang
    ISBN : 978-2-413-02221-3
    Nombre de pages : 56

    Royaume du Ndongo, en Afrique australe, 1617. Le nouveau roi Ngola Mbandi a chargé sa sœur Njinga de le représenter en tant qu’ambassadrice du Ndongo à une conférence de la paix qui doit se dérouler à Luanda, capitale de la possession portugaise, en présence du gouverneur. L’arrivée de cette femme noire à l’air si imposant ne passe pas inaperçue. Au début des négociations, aucune place assise ne lui est proposée, juste un tapis au sol. Njinga demande à l’une de ses suivantes de se mettre à quatre pattes pour lui servir de siège et pouvoir ainsi être à la même hauteur que ses interlocuteurs portugais. Elle refuse aussi de se soumettre à une règle protocolaire l’obligeant à recouvrir son visage de farine pour paraître blanche. Les Portugais comptaient sur la présence du roi, un homme facilement influençable, pour asseoir leur domination sur la région et garantir leurs affaires, le trafic d’or et d’ivoire mais aussi et surtout leur trafic d'esclaves vers leurs plantations du Brésil. Ils se rendent vite compte qu'ils vont avoir du fil à retordre avec cette femme fière et fin stratège qui parle même portugais pour mieux se faire comprendre. Dans son for intérieur, Njinga sait déjà qu’elle va devoir prendre la place de son frère sur le trône pour assurer l’avenir du royaume de Ndongo. Elle ira même jusqu'à se convertir au Christianisme pour avoir plus d’atouts dans son jeu et n’hésitera pas pour résister à l’envahisseur portugais à se rapprocher des Bangalas, réputés cannibales et adeptes des sacrifices humains. Avec la montée au trône de Njinga, la colonisation portugaise en Afrique a du souci à se faire… Njinga page 8Mon avis : Depuis 2012 (Aliénor), la collection "Les Reines de Sang" poursuit sa propre histoire en nous présentant le parcours de femmes qui ont réussi à gagner le pouvoir suprême en devenant reines, un peu partout dans le monde. Pour ce nouveau dyptique, Jean-Pierre Pécau nous fait découvrir l’histoire de Njinga Mbandi (1581-1663), future reine du Ndongo et du Matamba qui a marqué l'histoire de l'Angola du 17e siècle. Il nous décrit les stratégies utilisées par Njinga pour préserver l'indépendance du Ndongo et résister aux colons portugais dont on découvre les véritables motivations. Il souligne aussi la place prise par la religion à l’époque.
    Dans ce contexte, une femme, qui plus est de couleur, va réussir à briser des tabous en s’imposant face aux hommes pour traiter d’égal à égal avec eux et prendre son destin en main. Non seulement c’est une combattante sachant se battre sur le terrain, mais une femme habile et intelligente qui développe des stratégies politiques, diplomatiques et guerrières, voire davantage en se rapprochant des Bangalas réputés cannibales, afin d’arriver à ses fins, monter sur le trône et s’emparer du pouvoir.
    Un scénario captivant de bout en bout, riche en rebondissements où dominent la violence, les coups bas en tous genres, les trahisons et les intrigues, les assassinats...Njinga page 9
    Les dessins d'Alessia de Vincenzi (voir aussi Frédégonde, la Sanguinaire, dans la même collection des Reines de Sang) sont un témoignage fidèle de cette grande reine africaine.
    Elle nous fait partager quelques moments de sa vie antérieure et les drames familiaux vécus et illustre parfaitement l'ambiance des négociations avec les Portugais, la tension ressentie et la détermination presque palpable que Njinga manifeste dans les négociations.
    Un beau travail sur les personnages, costumes et tenues, des visages expressifs bien reconnaissables, des décors intérieurs et extérieurs soignés et fournis, tout comme les paysages africains.

    Très agréable mise en couleurs de Nurya Sayago apportant de la profondeur aux illustrations.

    Njinga par achile deveria au national portrait gallery 1930Portrait réalisé par Achile Devéria, National Portrait Gallery 1830

    A noter la très belle couverture de cette fascinante et majestueuse reine guerrière ici appelée Lionne du Matamba.

    SDJuan

  • LA DÉSOBÉISSANCE D'ANDREAS KUPPLER

    Desobeissance d andreas kuppler laScénario : Eric CORBEYRAN
    Dessin : Manuel GARCIA
    Couleurs : DEGREFF
    D'après l'ouvre de Michel GOUJON
    Dépot légal : Octobre 2020
    Editeur :
    Delcourt
    Collection : Mirage
    ISBN : 978-2-413-02631-0
    Nombre de pages : 106

    1936, les IVe Jeux Olympiques d'hiver se déroulent en Allemagne, plus précisément en Bavière dans la nouvelle station de ski de Garmisch-Partenkirchen. Pour l’Allemagne nazie, l’événement a surtout été un outil de propagande à la gloire d'Hitler et du Parti national-socialiste qui affirme de plus en plus son emprise sur le pays. Venu de Berlin couvrir les jeux, le journaliste Andreas Kuppler vient d’assister à la cérémonie de clôture qui s’est parfaitement déroulée. Plus tard dans la soirée, Andreas, dont le couple vacille, décide de s’accorder un moment de répit. Il se joint à la soirée organisée par les Américains au piano bar du grand hôtel. Il fait la connaissance de Suzanna Rosenberg, une belle femme juive new-yorkaise, avec laquelle il danse sur des rythmes de jazz et de rumba. Ce comportement "déplacé" va rapidement lui attirer des ennuis à commencer par les reproches de la direction de son journal qui lui avait déjà imposé de prendre la carte du parti nazi, ceux de son épouse Magdalena avec qui décidément rien ne va plus tant sur le plan relationnel que sur celui des opinions politiques, de ses beaux-parents, des conservateurs fervents admirateurs des nazis qu’Andreas juge trop sympathisants à son goût et qui ne lui sont d’aucune aide… mais lorsque la Gestapo commence à enquêter, le piège se referme sur Andreas, considéré comme étant passé dans le camp des ennemis du Reich … Desobeissance d andreas kuppler la plancheMon avis : Adapté du roman de Michel Goujon (initialement publié en 2013), le scénario d’Éric Corbeyran nous relate de manière plus succincte, format BD oblige, le destin d’un journaliste allemand dans une Allemagne qui se transforme en dictature. Tandis que sa vie personnelle et familiale se dégrade, il assiste à la lente transformation de la société allemande. Il s’interroge – sans doute trop – ce qui lui vaudra par la suite d’être considéré comme un opposant. Il est envahi par le doute et la peur mais comme tous ceux, nombreux, qui ont dû subir l’idéologie nazie sans y adhérer, que peut-il faire face à un tel raz-de-marée. La pression nazie se fait chaque jour plus forte. C’est une escalade dans l’oppression, de plus en plus destructrice pour qui se refuse à suivre le mouvement, le parti, ce que l’album rend très bien. La tension est presque palpable, anxiogène et étouffante. Sur fond historique, ce récit tout à fait prenant qui se lit d'une traite développe de manière intense, sombre comme un polar, plusieurs thématiques, la guerre bien sûr, la dictature avec ses faits tragiques et ses conséquences mais aussi leurs répercussions psychologiques sur les populations.Desobeissance d andreas kuppler la planche 5En charge des illustrations, Manuel Garcia fait preuve d’un savoir-faire d'une redoutable efficacité. Son dessin restitue comme il faut cette atmosphère noire et pesante. On connaît surtout Manuel Garcia par son travail sur les comics US où il est très à l’aise mais aussi la BD franco-belge dans les genres tour à tour historique (Le Troisième fils de Rome, Une génération française, Face à Face), polar (Les Voleurs de beauté) ou fantastique (La Terre des Vampires). À travers son dessin, on accompagne le journaliste, on est dans ses pensées, sa solitude, ses envies et ses peurs. De très belles cases à l'encrage marqué, ténébreux, des regards impressionnants comme celui de l'agent de la Gestapo, mais aussi de très beaux décors y compris sous la neige. Desobeissance d andreas kuppler la planche 2Le choix des couleurs de Degreff accentue encore un peu plus ce côté sombre en mêlant l'orangé et le bleu sur certaines scènes, comme sur la couverture.

    Un très bon album, constituant une belle entrée en matière pour découvrir de manière plus approfondie un sujet grave toujours d’actualité.

    SDJuan

  • JOUR J 42

    Jour j 42Tome 42 : Le Grand Secret 1/3
    Scénario : Fred BLANCHARD, Fred DUVAL & Jean-Pierre PECAUD
    Dessin : BRADA
    Couleurs : Jean-Paul FERNANDEZ
    Couverture : Nicolas SINER & Fred BLANCHARD
    Dépot légal : Octobre 2020
    Editeur :
    Delcourt
    Collection : Neopolis
    ISBN : 978-2-413-02393-7
    Nombre de pages : 56

    Succédant à Churchill, le nouveau Premier ministre anglais a demandé un armistice à Hitler, reconnaissant de facto la défaite de l’Angleterre et la supériorité allemande. À sa demande, une conférence doit avoir lieu aux États-Unis pour négocier un accord de paix en Europe. À New York justement, Mary et ses collègues travaillent au Bureau 103, installé dans un immeuble du quartier de Bowery. Ce service a été créé par le président américain pour enquêter sur la situation dans les pays européens occupés par l’Allemagne nazie et en particulier sur le cas des Juifs. Réfugié à Moscou, un général français nommé Charles de Gaulle vient de leur faire transmettre un document contenant des photographies aériennes prises en Pologne près du village de Chelmno. On peut y voir des bâtiments en cours de construction dans une sorte de casernement. Il pourrait bien s’agir d’un camp de prisonniers pour les Juifs. Mais faute d’éléments probants, Mary doit encore rencontrer ses contacts français afin d’en savoir plus. En partant le soir, elle sent qu’elle est suivie mais sans plus s’inquiéter. En fait, l’homme qu’elle a pris pour un agent du FBI l’attendait depuis pas mal de temps pour lui remettre une clé de consigne. À peine l’a-t-il remise que des hommes armés du SD, le service de renseignement de la SS dirigé par Reinhard Heydrich, se dirigent vers eux. Mary et l’homme mystérieux prennent la fuite mais ce dernier est rapidement abattu. Quant à Mary, elle réussit à rejoindre l’immeuble de Bowery et ses collègues du Bureau 103 pour établir un plan d’action… mais les choses vont très vite se gâter.Jour j 42 planche 1Mon avis : Respectant la marque de fabrique de la série Jour J, le trio de scénaristes, Blanchard, Duval et Pécau, nous entraîne dans une nouvelle uchronie, cette fois prévue en trois tomes. La tension est présente dès les premières pages de cette histoire rigoureusement écrite à partir de faits historiques habilement détournés. On est happé par la vision d’une Europe fragilisée par une Angleterre qui jette l’éponge, laissant l’Allemagne nazie organiser une Conférence de paix qui va assoir encore un peu plus son pouvoir. Un récit captivant, des scènes rythmées par des rebondissements inattendus, un suspense maintenu jusqu’à la fin de l’épisode et annonçant clairement une suite prometteuse. France et USA se sont alliés pour élucider le mystère planant sur le sort des Juifs. Et la guerre semble loin d’être achevée, surtout si l’Amérique entre dans le conflit. Jour J m’a toujours fait penser à une collection Marvel régulièrement publiée de 1977 à 1984 puis épisodiquement jusqu’en 2015. J’ai toujours apprécié cette vision des auteurs de comics qui laissaient libre cours à leur imagination sous le titre "What if…?" (Et si ? en français). Ici aussi on évolue dans des mondes alternatifs nous décrivant dans le détail ce qui se serait passé si des personnages cruciaux de notre histoire avaient choisi une autre voie, si des événements avaient évolué d’une manière différente, en découvrant ce que ce passé alternatif aurait modifié dans notre présent.Jour j 42 planchesLe dessinateur serbe Miroljub Milutinovic Brada qui a dû faire pas mal de recherches pour se documenter, illustre cet épisode de manière agréable en nous proposant de nombreux décors d’époque réalisés avec soin, New York et ses quartiers, ses immeubles et ses ponts si typiques, mais aussi Stockholm ou Barcelone et sa célèbre Sagrada Familia. Les personnages particulièrement nombreux sont facilement identifiables, un plus pour la compréhension du récit. Ajoutons une mise en page classique et efficace et des couleurs de Jean-Pierre Fernandez restituant bien les différentes ambiances du récit. Sans oublier l'impressionnante couverture de Nicolas Siner et Fred Blanchard

    SDJuan

  • LAMBIL - Une vie avec les TUNIQUES BLEUES

    Lambil une vie avec les tuniques bleuesEntretiens avec Christelle et Bertrand PISSAVY-YVERNAULT
    Dessin : Willy LAMBIL

    Couleurs : Willy LAMBIL

    Dépot légal : avril 2020
    Editeur :
    Dupuis 1
    Collection : Dupuis Patrimoine
    ISBN :
    979-10-34747-58-0

    Nombre de pages : 208

    On pourrait aisément intituler cette chronique "Blue Retro" ou "Les Vertes Années", faisant ainsi référence à deux albums de cette mythique série.
    Lorsqu'on tient dans les mains cette impressionnante "brique" de 207 pages fort joliment illustrées, on se demande bien comment on va pouvoir la digérer.
    Et puis, lorsqu'on se lance dans sa lecture, son contenu est tellement passionnant que les heures défilent sans que l'on s'en rende vraiment compte.Willy lambillote
    "Lambil, Une vie avec les Tuniques Bleues" est en quelque sorte une gigantesque Madeleine de Proust.
    Elle nous plonge, grâce à un auteur qui est à lui tout seul un sacré bonhomme, paradoxal comme on en rencontre probablement peu et rarement dans le monde des bulles, elle nous plonge, disais-je, dans l'histoire tant merveilleuse que tumultueuse de la Maison Dupuis, et oui, celle de Spirou, fleuron de notre bande dessinée belgo-belge.
    Au fil d'entretiens répartis de mai 2016 à septembre 2019, Willy Lambillotte nous relate, avec force émotion et sincérité, la vie d'un Passionné (avec un grand "P"), et le mot est faible, dont la vocation (et le terme ici n'est pas trop fort) d'être un jour dessinateur de bande dessinée, est née alors qu'il n'avait que 5 ans !
    Quand il franchit les portes de l'institution marcinelloise pour la première fois, il en a 16 !!LampilAlors autant vous dire que Lambil, aujourd'hui âgé de 84 ans, en a croisé du monde... après avoir parcouru ses vertes années, celles où il était enfant et qu'il nous dresse un émouvant portrait de son environnement familial, il s'épanche sur ces auteurs, dessinateurs, scénaristes, responsables divers de cette historique imprimerie devenue maison d'édition, qui l'ont accueilli, qu'il a croisés et côtoyés parfois pour le pire mais quand même souvent pour le meilleur.

     Aquarelle et interview 250 nuances de bleu 2​​​​​​​

    En effet, cela ne s'est pas toujours passé dans la sérénité ni la j​​​​​​​oyeuse frénésie que l'on pourrait imaginer.
    Comme il le souligne lui-même, parti de rien, engagé comme simple lettreur à 16 ans, devenu le fantastique auteur que l'on sait, il concède encore aujourd'hui, parfois de la tristesse, de l'amertume liées à des épisodes de sa (très) longue carrière même si, à d'autres moments, de belles rencontres ou la naissance d'une phénoménale amitié (entachée cependant de vilaines chamailleries !) avec Raoul Cauvin, son scénariste fétiche, ont cependant enrichi une bien formidable carrière professionnelle.Le duo​​​​​​​
    Au fils des questions-réponses, Lambil, spontané, vif et sans langue de bois, dénote d'une mémoire des lieux, des personnes, des événements, d'une exceptionnelle qualité.

    Une vie avec les tuniques bleues 4Il décrira ainsi trois générations d'auteurs, de créateurs pour lesquels il va se montrer tantôt admiratif, tantôt respectueux et parfois aussi... sans concession, exemple s'il en est des relations d'employeur à employé qu'il a vécues avec la famille Dupuis, pas toujours exceptionnellement chaleureuses.
    "Monsieur Charles", notamment, comme on l'appelait était avant tout un homme d'affaires, cela se ressent dans les commentaires distillés de-ci, de-là.​​​​​​​
    Lambil nous décrit donc un monde pas toujours habité de "bisou​​​​​​​nours", il le fait avec beaucoup de sincérité mais sans trop d'animosité.
    C'est un modeste et pourtant qu'est-ce qu'il aurait quand même aimé qu'on lui dise que ce qu'il créait était de qualité, c'est un énorme bûcheur, il a tout concédé à sa vocation, au point parfois de mettre en danger sa santé, tant physique que mentale !​​​​​​​

    Revenants du Pinkila Sandy

    Pour avoir tant apprécié son travail, sur ses séries anciennes, "Sandy et Hoppy", "Koala", "Pauvre Lampil" notamment, et puis applaudi à la reprise des "Tuniques" de Louis Salvérius et bien sûr pour avoir assisté à la consécration de cette saga (pour laquelle Raoul Cauvin vient de signer son 64e et tout dernier scénario), je peux affirmer ici que Lambil est un tout grand dessinateur, un fabuleux metteur en scène doublé d'un décorateur de génie... et je pèse mes mots.

    4 couvertures 2Fou amoureux de son métier, lorsqu'il décrit ses techniques, son travail sur les noirs et blancs qu'il affectionne, ses recherches de documentation (La Guerre de Sécession n'a plus guère de mystères pour Raoul et Willy), perfectionniste à l'extrême, Lambil se révèle être une sorte de funambule toujours sur la corde sensible d'une reconnaissance qu'il n'a pas toujours obtenue à sa juste valeur, toujours inquiet d'un talent qu'il possède mille fois plutôt qu'une, dont, paradoxalement, j'y reviens, il doute encore parfois.
    Il peut se montrer dur avec lui-même, il l'est parfois aussi avec un public qui lui est pourtant fidèle mais à chaque fois il ne peut s'empêcher de se poser des questions, doutant par exemple et pestant contre l'image de dilettante que ce même public peut avoir d'un métier particulièrement ingrat (ne jamais oublier que vouloir devenir dessinateur de BD a longtemps été moqué, dénigré et méprisé).​​​​​​​

    ​​​​​​​Couvertures 1 Rumberley

    Lambil est un auteur multi-facettes, dessinateur et aquarelliste réputé, on l'oublie parfois, ces rencontres permettent d'entrevoir un personnage singulier, attachant, pas toujours lisse, parfois déconcertant mais qui ne laisse pas indifférent.Lambil en tunique bleueBref, un parcours personnel, professionnel très riche, sans aucune uniformité et ce n'est pas un jeu de mot rapport à la série que nous aimons depuis si longtemps et que nous souhaitons encore pouvoir apprécier... mais c'est une autre histoire...

    Je vous invite dès lors chaleureusement à découvrir ce beau "roman" d'une vie drôlement bien remplie.

                                                                                                    Pour Créabulles asbl,      

    Bernard Defrère